Xavier Hanotte

Xavier Hanotte est un écrivain belge francophone né à Mont-sur-Marchienne le 31 octobre 1960. Germaniste de formation, il s’est spécialisé dans l’informatique après avoir travaillé quelque temps dans l’édition juridique. Il est le traducteur de l’auteur anversois Hubert Lampo et du poète anglais Wilfred Owen. Ses romans sont publiés aux éditions Belfond. Des critiques étrangers le rapprochent de Simenon ou Michaux [2]. Titulaire de nombreux prix littéraires, il a été élu à l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique le 11 octobre 2014 (fauteuil no 3).

Xavier Hanotte publie son premier roman, Manière noire, en 1995. Il s’agit du premier volume mettant en scène l’inspecteur bruxellois Barthélemy Dussert, alter ego avoué de l’écrivain. Leur principal trait commun est de traduire les vers de Wilfred Owen, météore de la poésie anglaise, décédé au front de la Somme en 1918. Le héros traîne également derrière lui une lourde déception sentimentale. Elle s’appelle Anne, et l’a éconduit sept ans plus tôt. Cet événement justifierait son engagement dans la police. Dans ce premier récit, Dussert enquête sur le retour parmi les vivants d’un malfrat prétendument décédé, André Maghin.

Trois ans plus tard, De secrètes injustices remet en service l’inspecteur Dussert et ses collègues, cette fois pour résoudre le meurtre d’un négationniste, Rudiger Hubermann. Dussert est préoccupé par ses traductions d’Owen, qu’il compte publier, et par une histoire d’amour sans lendemain avec Aline, rencontrée lors de l’affaire précédente. En outre, entre les chapitres du roman s’intercalent des parties en italiques représentant le travail d’écriture de l’inspecteur à propos des victimes de la première guerre mondiale. L’intrigue policière s’efface peu à peu pour laisser place aux préoccupations centrales de l’écrivain et de son double.

Dans Derrière la colline, en 2000, (Prix Marcel Thiry) l’autre côté du miroir est atteint. La narration a pour cadre le front de la Somme pendant la Grande Guerre, et met en scène un jeune homme poète à ses heures, Nigel Parsons, de son nom de plume Nicholas Parry, qui s’engage aux côtés de son ami William Salter. Ici aussi, des parties placées entre les chapitres sortent du déroulement du récit. Il s’agit de lettres de William Salter adressées à son fils. Mais le lecteur apprend au fil de l’histoire que Nigel Parsons a pris l’identité de son camarade à l’issue d’une bataille. Dans la partie annexe en fin de roman se trouvent une lettre de l’épouse française de Parsons devenu Salter, et une autre du chef de laboratoire de la police judiciaire de Bruxelles, toutes deux adressées à Barthélemy Dussert. L’inspecteur est donc en quelque sorte protagoniste de la narration mais en négatif, alors que l’on devine qu’il s’est intéressé à l’échange d’identités entre les deux hommes. Le roman devient explicitation de sa thèse.

Changement de registre en 2002 avec Les lieux communs, l’inspecteur Dussert laissant la vedette à Serge, un petit garçon parti en excursion au parc d’attraction Bellewaerde avec sa tante Bérénice, et Pierre Lambert, un soldat canadien montant au front au même endroit en 1915. Là où auparavant, la coupable des déceptions amoureuses des protagonistes était l’éternelle absente, c’est elle qui est ici à l’avant-plan : la tante Béré a quitté son compagnon Pierre, et se comporte de façon plutôt frivole. Le petit garçon et le soldat, en tant que narrateurs, prennent chacun à leur tour un chapitre en charge, leurs dimensions tendant à se confondre.

Deux ans plus tard, Ours toujours étonne avec une sortie en apparence totale des sentiers hanottiens : Owen et la première guerre mondiale s’effacent au profit d’une bande d’ours civilisés, contraints de jouer la comédie pour le public qui vient les observer dans leur réserve naturelle. Le narrateur diffère des précédents, qui, comme Dussert et Parsons, étaient ces êtres nostalgiques déçus par l’amour et poètes. Un tel personnage est tout de même à nouveau présent dans le roman sous les traits de l’ours Onésime.

En 2005 sort le recueil L’architecte du désastre, qui reprend deux romans courts dont le récit donnant son titre à l’ouvrage, et plusieurs nouvelles éditées auparavant dans des revues. Le recueil de nouvelles est divisé en trois parties comptant chacune trois nouvelles. Ces parties caractérisent le temps dans chaque récit. La première partie, « Les temps enfuis », comprend des nouvelles prenant place durant les deux guerres mondiales. La dernière partie, « Les temps présents », met en scène une héroïne actuelle, Donatienne, inspecteur de police, en quelque sorte pendant féminin de Barthélemy Dussert. Quant à la deuxième partie, elle s’intitule « Les temps poreux » et contient des nouvelles dans lesquelles le passé et le présent se rejoignent.

« L’architecte du désastre », premier roman court, narre une mission de l’officier allemand Eberhard Metzger en Belgique occupée lors de la Deuxième Guerre mondiale. Celui-ci est chargé de juger la qualité artistique d’un monument aux victimes des gaz du conflit précédent, décidant ainsi de son sort. L’officier se fait violence pour écrire un rapport positif, bien qu’il trouve le groupe sculpté de piètre valeur. Malgré cela, le mémorial est dynamité par l’armée allemande. Lors de son séjour dans les Flandres, Metzger se remémore un voyage en Angleterre qu’il a fait en solitaire des années plus tôt, avant son mariage qui fut un échec. Il y avait rencontré une jeune Écossaise dont il était tombé amoureux, et qui avait dû depuis périr dans le bombardement par l’Allemagne de sa ville de résidence, Coventry. Ce récit a connu en 2006 une réédition sous le titre Un goût de biscuit au gingembre.

« Sur la place » expose un groupe de soldats anglais de passage à Mons en 1914. Ils se confrontent à la complexité linguistique du Plat Pays.

« La finale du capitaine Thorpe » retrace l’histoire de l’attaque de Montauban en 1916, lors de laquelle les Anglais auraient chargé la tranchée ennemie, motivés par des tirs de ballons de football.

« Passé le pont » est le second roman court du recueil. Il s’agit d’une intervention sur le terrain de Barthélemy Dussert et sa collègue Trientje Verhaert. Ils se trouvent en planque à une quinzaine de kilomètres de Bruxelles, près d’un canal, où un exploit a été accompli lors de la première guerre mondiale. Un homme étrange hante les lieux, influençant le cours de la mission des deux policiers. Deux dimensions temporelles se rejoignent à nouveau, comme cela a été le cas dans Les lieux communs.

« Près des fleuves de Babylone » se déroule en Irak contemporaine. Des soldats anglais visitent un cimetière de victimes de la Mesopotamian Expeditionary Force, des compatriotes présents dans la région en 1919.

« À la recherche de Wilfred » est le compte-rendu d’un voyage de Dussert à Bordeaux, où Owen a séjourné avant la guerre.

« Le reste est silence », « Sauce chasseur », et « Les justes » mettent en scène la nouvelle héroïne Donatienne, elle aussi inspecteur de police à Bruxelles, filant sans arrêt ses bas nylon, comme d’ailleurs la plupart des personnages féminins de Xavier Hanotte. Elle cache son métier à son compagnon qu’elle a l’intention de quitter.

Certaines nouvelles publiées dans différentes revues n’ont jamais été éditées en recueil : Drapeau blanc en 1998, Demain, le temps sera pluvieux en 1999, et. en 2003, Un casque sur le trottoir. Cette nouvelle a pour narrateur un soldat écossais. Le vieil homme est en visite dans les Ardennes belges, il vient saluer la tombe d’un camarade tué en 1944. Il se remémore également sa rencontre, alors qu’il était en poste en Palestine, avec un jeune reporter belge, roux, accompagné d’un petit chien blanc…

Comment j’ai rencontré Xavier Hanotte, datée de février 2005, place le lecteur dans une situation surréaliste. Cette nouvelle est signée Barthélemy Dussert, et narre la rencontre au cimetière des Remparts à Ypres entre l’écrivain et son alter ego de plume.

Enfin, en tant que traducteur de Wilfred Owen, Hanotte a publié en 2001 Et chaque lent crépuscule, une édition bilingue de certains poèmes et lettres. Sa propre production poétique se retrouve dans Poussières d’histoires et bribes de voyages, un recueil de 2003 dans lequel on peut retrouver les thèmes chers à l’écrivain. Chaque poème est précédé d’un paragraphe introductif en prose, qui en explique le propos.

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