Freak out, place au délire !
Le vrai, c’est faux !
Le Fake, c’est chic !
Avec le recul, je ne verse pas une larme sur mes engagements du temps où je me voulais un révolutionnaire et justicier du Net, toujours en chasse des escroqueries et mensonges dont tant de margoulins de la finance, des sentiments et des news sévissent encore. Une époque où je me gargarisais du titre quelque peu sulfureux d’irrégulier, voire d’anarchiste des réseaux sociaux et de la communication en ligne. Avant de laisser tomber ces postures de pirate d’opérette et d’opter pour ce que d’aucuns, me voyant à la tête d’une start-up florissante, ont pu prendre pour de l’embourgeoisement.
Pauvres pommes, ceux-là qui me considèrent comme un has been de la contestation directe, voire pour un parjure ! Assoupis du bocal qui ne saisiront jamais à quel point je suis libre, bien dans ma peau et mes idées, libre de mon destin. Car la vérité, plutôt que de se nicher toujours ailleurs, est bien ici et est seule mienne ! Jamais comme aujourd’hui je n’aurai ressenti la satisfaction d’être au meilleur de mes virtualités d’agitateur public, fort de cette nouvelle donne : faire du désordre généralisé la seule pratique créatrice à la mesure des temps contemporains !
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Plus j’y pense, plus s’impose l’évidence que c’est dans la folie collective du disco des années 1970 que sont à trouver les bonnes intuitions ! Bon sang – Freak out ! -, c’est le groupe Chic qui voyait juste en affirmant que la voie du salut passe par un délire généralisé. Une de ces trouvailles qui, pour ceux qui savent écouter et réinterpréter, indiquent la voie sacrée d’une refonte radicale du monde et de ses sociétés.
D’où cette pulsion irrépressible qui m’a conduit à créer la désormais célèbre TP – prononcez « tipi », pour Transworlds Prophecies – où je fais ma pythie sans discontinuer, mettant au service d’un très vaste réseau de sites associés toute une gamme de possibles au copyright TP, constamment renouvelés, dont ils feront leur miel dans les domaines les plus divers : de la Bourse mondialisée au tourisme de masse et au divertissement, en passant par l’agroalimentaire et l’entreprenariat d’affaires.
Quelques exemples simples, pris au hasard dans mon menu d’hier : la terre n’a jamais tremblé du côté de Haïti, la centrale nucléaire de Fukushima fonctionne désormais à plein régime ; réchauffement climatique oblige, une faille insoupçonnée jusqu’il y a peu menace la Floride, et les dernières statistiques sont parfaitement rassurantes en matière de ressources à très long terme de filières bois et charbon… Quant à la mort prétendue des abeilles, elle n’est pas pour après-demain !
Autant de leviers de nature à redessiner les modèles de pensée collectifs et individuels, et à réévaluer sans cesse les stratégies planétaires.
Tout en faisant de moi mieux qu’un oracle délirant, un écrivain allumé ou un simple exploitant de la crédulité humaine : le scénariste du réel, dont tout un chacun sait que vérités et mensonges s’y entrecroisent intimement. Le vrai c’est faux ! Et libre à chacun de choisir ce que vrai lui semble ! Freak out !
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J’ai enclenché mes joyeuses méninges et je vois défiler sur mon écran les premières de centaines de fake news dont je vais alimenter la réflexion humaine tout au long de la journée. Intuitions soudaines et illuminations parfois proches du grandiose, que j’enfile comme des perles.
La très longue tournée russe de la diva Fleur Callagher s’explique par la profonde passion qui la lie à présent au président Putin…
De sa Corée du Nord, le président éternel Kim Jong-il a fait exécuter son demi-frère King Jong-nam en plein aéroport de Reykjavik, non en raison des rancœurs politiques de ce dernier, mais pour mettre fin aux rumeurs de l’amour gay qui aurait uni les deux hommes durant leur adolescence…
Les palmarès des manifestations gymniques du prochain Championnat paneuropéen sont disponibles dans le dark web, avant même que la ville de Rochester ait été officiellement confirmée comme siège de la manifestation…
Autant de secrets de polichinelle alimentant les rouages d’un monde sans plus de gauche que de droite et où la personnalité, où le don de persuasion tiennent lieu de savoir-faire et de participation franche au changement permanent.
L’Ardenne belge se remet lentement de la série d’attentats terroristes qui d’Arlon à Neufchâteau, en passant par Libramont, ont clairement visé à réduire à néant l’élevage clandestin de gibier…
L’astéroïde Hilaire, qui se rapproche dangereusement de notre Terre depuis plus d’une année est dès à présent donné vainqueur à soixante contre un par le très respecté Laboratoire météorologique de Mexico City…
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Bien sûr la vie, comme ses certitudes, fluctuent pour moi aussi. Que reste-il de moi, par-delà ma suractivité ? Peut-être moins que je ne le crois, ai-je parfois l’impression. Même si les échanges sexuels extrêmes que j’expérimente à distance via le logiciel Polyclimax – un dispositif gracieusement mis à ma disposition par Total Instinct – ne laissent planer aucun doute sur l’intensité de mes appétits sexuels.
Encore Véronika, ma partenaire interactive, ne manque-t-elle pas de me taquiner en me larguant des remarques du genre de « chez toi, tout est dans l’idée », ou bien m’affirme fielleusement avoir la conviction, que bientôt, je pourrais me passer d’elle…
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J’en arriverais à vivre en parfaite autarcie, seul avec mes trouvailles ? Pas tout à fait sûr… Même si, je le concède et le revendique, mes véritables orgasmes naîtraient plutôt de l’accumulation, de la multiplication de mes visions intimes : cette génération exponentielle de possibles et d’impossibles que je donne en pâture à l’espace internet comme autant de poignées de dés multicolores, au cours d’un gigantesque jeu dont les issues sont fluctuantes.
Alors, me réduire pour l’essentiel à une machine à fabriquer des idées ? À une source sans cesse jaillissante de données désordonnées dont je laisse à d’autres que moi le soin de les mettre ou non en perspective ? Pourquoi pas, après tout, puisque seul compte en mon état, le délire permanent qui ce matin même, me fait traduire l’instabilité du réel sur le mode versatile.
Le prince épiscopal de la principauté d’Andorre vient de publier sous pseudonyme la liste du top de ses toy boys, tandis que le Prince du Liechtenstein dit se faire fort de divulguer sa sélection des plus luxueux bordels mondiaux.
Le chanteur Matt Rowlands, du célébrissime groupe Private, annonce tapageusement son clash avec la Première de Grande-Bretagne, au profit inattendu du leader du parti indépendantiste d’Écosse.
Gerbe de scoops légers, question d’amorcer en douceur une nouvelle incursion dans la jungle numérique où ma déraison résonne.
Freak out, place au délire !
Toute vérité est transitoire, ambulatoire
Et le réel est lunatique, protéiforme…
Le vrai, c’est faux !
Le Fake, c’est chic !