D’ici, de ma fenêtre, je ne peux voir la mer. Je n’aperçois que des nuages de couleur sombre qui se désintègrent, et la pointe du Tibidabo. Rien de très joli. Des immeubles, hauts et laids, avec leurs fleurs fanées aux balcons et leurs stores jaunes brûlés par le soleil. Je ne peux voir la mer parce qu’elle est bien loin d’ici, de l’autre côté de la ville. Endeuillée, grasse, presque puante, elle berce, comme une nourrice, des bateaux de commerce, des yachts et des bateaux-mouches à quai. Cette mer-là ne ressemble pas du tout à la nôtre. C’est une surface métallique, épaisse et d’un gris uniforme. Coagulée, bourbeuse. Mais elle me manque. Elle me manque parce que, quand je la regarde, je pense que tu vis de l’autre côté, et que d’une mer à l’autre, d’un rivage à l’autre, le chemin est bien plus court que d’une ville à l’autre. Lire la suite