Le paradis est fait de souffrance.

Ma mère Timka

Ce que Goran détestait le plus c’était de faire ses devoirs scolaires. Il aimait dessiner. Même maintenant pendant qu’il recopiait dans son cahier 1×3 = 3, 2×3 = 6, 3×3 = 9… de sa table de multiplication, il avait envie d’interrompre cette série ennuyeuse et de continuer à dessiner le cheval sur la feuille qu’il avait cachée sous le manuel de maths. Aller à l’école, c’était un plaisir pour lui. Il aimait surtout les leçons pendant lesquelles l’institutrice leur racontait les histoires extraordinaires des peuples anciens, les habitants des continents lointains. Il adorait dessiner les animaux comme les dinosaures et puis en donnant libre cours à son imagination aimait leur inhaler de l’âme et les regarder dans un combat farouche. Pourtant, sortir de l’école avec ses copains et s’abandonner à l’élan juvénile, courir au parc pour ramasser les marrons, rivaliser en vitesse, jouer au foot sous la surveillance vigilante du « Keiser », le gardien du parc en uniforme vert, qui s’ennuyait évidemment, c’était le rêve de tous les rêves ! Mais rien n’était plus comme d’habitude. Son institutrice, aimable, souriante, prête à l’aider, à caresser ses cheveux, est devenue tout d’un coup lointaine, sérieuse, étrange. Ses sourires, à vrai dire très rares ces derniers jours, étaient maintenant réservés aux autres enfants. Elle l’ignorait. Pourquoi, il ne savait pas. Peut-être, ces effervescences dans la ville et à la télévision l’avaient probablement perturbée, l’avaient poussée dans cet abîme de non-sens et elle a côtoyé, elle aussi, le comportement incompréhensible des autres adultes. Lire la suite