À Dominique Grandmont
Feu aux entrailles
Feu sur tout
Crépite sang
Sonne le glas
D’un monde ancien ? !
Et je me tourne par un ciel lourd tonnant
criblé d’astres hiéroglyphes vers
mes morts tant songées toutes mes morts
enduites de feu ailées que rien n’arrime
Quelle eût été déjà ma demeure ?
De quelle lignée de traîtres
d’égorgeurs d’hommes descendé-je ?
Ah le poignard damascène incrusté de rubis
la goutte de sang qui luit à la pointe
par les nuits de pleine lune !
Enfant déjà je m’employais à raffiner
ma lâcheté :
n’avais-je pas dans le dos balafré une beauté
Et je récitais
pris encore dans le vertige extatique
de mes séances hygiéniques secrètes
des sonates entières du Coran.
Je fus ainsi pardonné
Père !
Et jusqu’au siècle des siècles
je me roulerai aux pieds de ton trône
auréolé des sept anges !
N’eus-je pas été de toutes les apocalypses
de tous les massacres
de tous les sièges
N’eus-je pas été de toutes les fièvres
orgiaques :
titubant dans les places publiques,
je levais à la gloire des bourreaux
des coupes débordant de sperme
suppurant !
Et la foule tout autant enivrée
en chœur répétait mes scansions :
« Alléluia ! Alléluia !
Et je devins la victime sublimée
et je devins le juif du juif… »