I

Félix

C’était un matin en début d’hiver. Félix écrit, jeune étudiant penché sur son pupitre dans sa chambre, au neuvième étage d’un immeuble aux longs couloirs perpendiculaires à la rue Francisco Sá, à trois pâtés de maisons de la plage de Copacabana. Dans la petite chambre, il rassemble ses réflexions sur le poème de Milton, le Paradis perdu, met en ordre les annotations qu’il a faites durant ses derniers mois de lecture et d’étude. Il écrit, s’arrête, rature, il ne sent pas la vibration de la sonnette à l’œuvre à côté, ni l’engourdissement de sa jambe, dans la même position depuis quatre heures. Il ne redresse pas sa tête pour dérouler sa colonne, il ne regarde pas de sa fenêtre le quadrilatère d’immeubles semblables au sien, ni la favela Pavão-Pavãozinho qui part à l’assaut du morne avec son vert dépourvu de vigueur.

Désormais totalement aveugle, à Londres, dans les étés précédant l’année 1667, Milton s’était penché sur la chute de Lucifer depuis le Ciel et sur l’expulsion d’Adam et Ève hors du Paradis. Lire la suite