Je l’aperçus du coin de l’œil, au milieu des arbres. Ma voiture filait sur une étroite route de campagne. Au moment où je traversais une forêt, sa présence me choqua. La vitesse à laquelle m’entraînait mon véhicule ne me permit pas de l’observer réellement ; pourtant, en une fraction de seconde, une multitude de détails me frappèrent : l’oiseau était malade, il se tenait à demi caché derrière les feuilles comme un mendiant humilié. Son plumage, au lieu de l’envelopper, lisse et serré autour de son corps pour le protéger du vent, donnait l’impression d’avoir subi l’outrage d’une forte tempête ; des plumes noires émergeaient çà et là de ses ailes, prêtes, eût-on dit, à être arrachées. Il respirait comme un homme essoufflé, épuisé, la tête penchée vers l’avant dans une attitude qu’aucun oiseau, jamais, n’a pu afficher. Ses yeux même me blessèrent par le terrible effroi qu’on y lisait. Les oiseaux ont-ils des paupières ? Il me sembla que les siennes étaient à moitié baissées, dans une triste somnolence. Lire la suite