Voici un extrait caractéristique du dernier roman de l’écrivain grec Thanassis Valtinos, Orthokosta publié à Athènes en 1994. Centré sur une révélation pour le moins choquante (sous l’Occupation, les communistes grecs transformèrent, dans le Péloponnèse, certains monastères en camps de concentration), Orthokosta a provoqué à Athènes une polémique. Valtinos, disait-on, avait osé donner la parole aux « réactionnaires », à ceux qui s’étaient enrôlés dans les Bataillons de Sécurité, la contre-révolution soutenue par les Allemands. Il est difficile de ce côté-ci de l’Europe de saisir toute la complexité de la situation créée en Grèce durant la dernière guerre. Que des résistants — ou des gens qui se proclamaient tels — firent passer leurs vengeances personnelles avant les idéaux dont se réclamait l’organisation à laquelle ils appartenaient, c’est un fait avéré pourtant. Valtinos a fondé son roman — qui a tout d’une savante marqueterie — sur des témoignages recueillis auprès de villageois entraînés malgré eux dans le déchaînement de la fureur guerrière. Des villageois qui font songer à d’autres, plus proches de nous, exposés à la même absurdité « balkanique ».

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