J’ai toujours cru qu’un jour une histoire viendrait bouleverser ma vie comme par surprise. J’ai toujours marché dans des villes étrangères, en visite chez des inconnus, cherchant à atteindre quelque chose dont j’ignorais la nature. Cela n’avait rien à voir avec une recherche, c’était simplement un mouvement, une errance sans fin. Villes et rencontres n’étaient que prétexte. Il n’y avait rien à trouver, je ne savais même pas quel cap je voulais passer. Quand je m’éloignais de Berlin, j’avais l’étrange impression de ne plus être retenu par des amarres, tel un navire qui a levé l’ancre et qui se laisse entraîner vers la mer par le courant.

Ce sentiment se trouvait renforcé par la singulière voie de transit qu’il fallait emprunter pour sortir de la ville, par les postes frontières à la fois effrayants et grotesques, par les agents en service, ressemblant aux figurants d’un film tourné à moindre prix. Je m’éloignais de Berlin et de moi-même, il n’était pas rare que je prolonge le mouvement du voyage en descendant de la voiture ou du train pour remonter dans un autre moyen de transport : un bus, un train, un bac. J’évitais ainsi la panique qu’aurait entraînée l’arrêt du mouvement.

Je voyageais sans souhaiter arriver quelque part, peut-être parce que j’étais moi-même le résultat d’un voyage, d’une fuite. Mais je n’étais pas un bon voyageur. Jamais je n’étais aussi énervé et de mauvaise humeur qu’à la veille d’un départ. Je me lançais jusqu’à la dernière minute dans des activités endiablées qui n’étaient que des manœuvres de diversion. Et puis à chaque fois, ma valise était beaucoup trop lourde.

Chaque recherche, chaque voyage nous entraîne vers l’à peu près jusqu’au jour où l’on découvre le lieu à partir duquel on devine les antécédents de notre propre histoire et qui livre la clef des souvenirs refoulés en apaisant nos vieilles angoisses. Ainsi, on raconte toujours trop tôt. On ne peut arriver que dans le passé.

J’ai onze ou douze ans. Mes parents reviennent de faire les courses. Au moment où je vois la coccinelle noire entrer dans la cour, un tour me vient à l’esprit et il faut que je l’exécute à tout prix. Je sais très bien que mon idée est idiote et qu’elle sera probablement sanctionnée par une gifle ou une tape. Mais je ne peux y résister. Me réjouissant à l’avance de ma supercherie, je suis pris d’un rire convulsif. Je ferme la porte qui sépare la salle à manger du hall d’entrée, puis fait passer la clé sous la porte. Entre-temps, ma mère est arrivée en haut et s’en prend à la porte qui ne veut pas s’ouvrir. Elle ne comprend pas ce que je lui crie, peut-être a-t-elle un paquet entre les bras. Et moi de lancer joyeusement « la clé est tombée par terre ! ». Elle finit par la trouver sous le tapis et ouvre la porte. C’est à peine si elle me gronde, elle me regarde simplement de travers comme si mon comportement l’inquiétait. Mon père arrive beaucoup plus tard, il n’a rien vu de la scène. Ma mère ne lui dira rien et je suis déçu. J’aurais tant voulu qu’ils viennent me délivrer, tous les deux ensemble.

À cette époque-là, Jésus-Christ avait encore une voix. Elle se faisait entendre, douce et pénétrante, sous la charpente en bois de l’église aux murs blanchis à la chaux. Cela n’empêchait pas Don Camillo de se mettre en colère à la moindre occasion, de jurer, de grimacer en montrant ses longues dents blanches, de lever les bras au ciel ou de se battre comme un garnement : il lançait des tables, des bicyclettes à la face de ses ennemis ou se défendait avec des gourdins qu’il avait lui-même taillés, quand ce n’était pas avec des fusils restés cachés depuis la fin de la guerre. Cet homme grand, pas toujours habillé de noir et à la mâchoire de cheval, pouvait à peine maîtriser son trop-plein d’énergie. Il ne supportait aucune vexation ni aucune défaite, mais une voix off, mielleuse, le ramenait toujours, à l’aide de questions ou de remarques ironiques, à l’inévitable chemin de la soumission.

Le plus souvent, j’étais assis au deuxième rang, près de l’allée centrale et, devant moi, Brinkhoff s’agitait sur sa chaise. Dans un vieux cahier d’écolier, il dessinait des femmes nues. « Je ne sais pas pourquoi », disait-il en lissant ses cheveux enduits de brillantine, « mais je ne sais dessiner que ça. » Il arrachait les pages de son cahier, puis les faisait circuler dans les rangs. Nous regardions avec étonnement les fines esquisses de Brinkhoff, entre deux bonnes vieilles dictées ou autres problèmes de calcul.

Au fond de cette longue salle étroite ronflait le projecteur, placé sous la responsabilité de mon frère. Les rayons de lumière se frayaient un chemin à travers la poussière pour entrer en contact avec l’écran accroché juste devant l’autel. Don Camillo encourageait vivement son équipe de football, intimidait les jeunes chrétiens qui devaient jouer contre l’équipe du maire communiste. Vous êtes les meilleurs, disait-il, le Bien est de votre côté, mais si vous perdez, gare à vous, vos dents trépasseront une par une, sans parler de votre nez – et l’on ne doutait pas un instant qu’il mettrait ses menaces à exécution. Cette brutalité bénie n’avait cependant pas empêché ses joueurs de perdre, même si la victoire ne tenait qu’à un penalty, décidé par l’arbitre payé plus avantageusement par Peppone. À la fin du match, la foule en colère se mit à sa poursuite, et il ne trouva pas de meilleur refuge que l’église de Don Camillo. Jésus-Christ restait indifférent devant le résultat des matches.

Notre ville, épargnée par le regroupement communal bien qu’elle n’atteignît jamais la barre des 100 000 habitants, passait pour la ville la plus sale de la Ruhr mais se plaisait à promouvoir « ses lacs, ses forêts, ses châteaux ». Cela n’empêchait pas le linge qui séchait dehors d’être saupoudré de suie, et, à la lumière du crépuscule, les nuages prenaient la couleur du soufre. Notre quartier se trouvait tout au nord et était séparé du reste de la commune par une double frontière formée par la rivière Emscher et l’autoroute, construite parallèlement à celle-ci. Quelques centaines de mètres derrière notre cité, au-delà du canal et des grandes écluses, commençait à se dessiner la campagne de Westphalie avec ses plaines, ses petites forêts et ses châteaux d’eau.

Notre quartier passait pour un « quartier rouge ». En allant un jour au culte, j’avais vu, sur un pont reliant les rives du Emscher, une affiche revendiquant la « liberté pour le parti communiste ! ». Chacune des lettres était peinte en blanc, puis recouverte à nouveau de noir, mais de façon à ce qu’on puisse encore lire le slogan. La plupart de nos pères travaillaient à la mine ou à l’usine chimique, mais notre sympathie allait sans ambiguïté à Don Camillo, peut-être à cause de sa ressemblance avec le Pasteur Pütthoff qui, l’hiver, organisait avec nous des batailles de boules de neige sur un terrain vague près de l’église.

Nous étions moins à l’aise avec le surintendant Stahl-kemper, plus sévère et plus dur. Il avait un défaut de prononciation : quand il parlait, ses joues se gonflaient légèrement comme s’il lui fallait pomper de l’air dans chacune de ses phrases. Il s’occupait tout particulièrement de moi et voulait savoir ce qui se passait à la maison, mais je n’avais pas confiance en lui. Et jamais je n’aurais raconté à un étranger ce qui se passait chez nous.

Le mercredi après-midi, nous allions au ciné-club en espérant que la pellicule succomberait une fois de plus à la chaleur du projecteur. Sur l’écran, l’image se décomposait en faisant apparaître de merveilleux anneaux en couleur, peu à peu se formait au centre une tache blanche qui poussait les restes de l’image vers les bords de l’écran avant que ne triomphe complètement la lumière blanche. Un soupir se faisait entendre dans les rangs, la salle s’éclairait pendant que le film finissait de se dérouler, jusqu’au moment où le bout de la pellicule se mettait à flotter dans l’air en claquant contre le projecteur. Un jour, la séance fut si souvent entrecoupée de pauses, consacrées à recoller le film, qu’à l’heure de la dernière séance, nous n’avions vu que la moitié du film mais les interruptions nous avaient beaucoup plus amusés que le spectacle.

À notre palmarès se trouvaient les films italiens dans lesquels on retrouvait des colleurs d’affiches, à qui l’on volait les bicyclettes, des mères de famille pleurant ou jurant dans leur cuisine, des garçons de notre âge qui s’adoraient ou se battaient, imaginaient des mauvais coups ou se trahissaient entre eux. Plus tard, ils devenaient tout de même des “amis pour la vie” mais seulement à l’aéroport quand leurs petits visages se pressaient contre la vitre qui séparait à jamais ceux qui partaient de ceux qui restaient.

Mon ami pour la vie ne faisait pas partie de mon groupe de catéchisme puisqu’il était catholique et plus jeune que moi.

Quand je tombai amoureux de sa sœur, il avait neuf ans. Elle en avait onze, et moi, déjà quinze. Plus de cinq années me séparaient d’Alexandre, comme de mon frère aîné, mais je savais qu’un jour il serait mon ami, le compagnon et l’interlocuteur que je désirais tant.

Un petit bonhomme fragile au visage bien sculpté, nous regardant jouer au football et que nous, bien plus grands, laissions jouer seulement lorsqu’un de nos joueurs manquait, mais qui se mettait dans nos jambes ou qui marquait des buts contre son propre camp – voilà ma toute première image d’Alexandre.

Sa sœur Astrid était une star. Elle était vive, bruyante, se mettait toujours en avant. Très mince mais pleine d’énergie, elle se livrait à d’impitoyables bagarres avec Alexandre, qui finissait le plus souvent par capituler. Sa tenue préférée se composait d’une jupe à carreaux et d’un chemisier. Elle changeait constamment de coiffure. Ses cheveux étaient tantôt permanentés, tantôt coupés à la garçonne, mais on la vit aussi avec d’incroyables montagnes surplombant son visage, parfois encadré par de belles anglaises. Malgré l’interdiction de son père, elle fut la première fille de la cité minière à porter la brosse que nous appelions la “coupe Mecki” d’après le principal personnage de notre bande dessinée préférée, le hérisson Mecki.

Pour la coupe Mecki, nous nous rendions chez un coiffeur que nous surnommions Bagou et dont la boutique était située près du terminus du tramway. Bagou était un colombophile fanatique ; à ses clients, il parlait inlassablement des exploits de ses oiseaux extraordinaires. Quelquefois, le samedi matin, nous allions regarder le départ des pigeons qu’on plaçait dans les nombreux compartiments d’un camion spécial qui les emmenait vers la frontière hollandaise ou vers la mer du Nord d’où les mâles, qui avaient été séparés de leurs femelles, reviendraient vers elles ; on appelait cela le vol des veufs. Et le dimanche matin, les propriétaires allaient dans la rue pour scruter le ciel en attendant leur retour. Dès qu’ils étaient revenus, les pigeons étaient débarrassés de leur bague que l’on insérait rapidement dans la pointeuse pour marquer l’heure d’arrivée. On racontait qu’un jour, Bagou avait pris son fusil pour abattre Berti, son oiseau préféré, car celui-ci avait trop longtemps survolé la maison plutôt que de regagner au plus vite le pigeonnier sous le toit.

Lors de réunions familiales, Astrid se mettait en vedette. Elle présentait ses nouveaux vêtements, ses nouvelles coiffures ou bien dévoilait ses projets qui variaient du « je ne me marierai jamais » au « quand j’aurai vingt ans, je me pendrai ». Les adultes riaient de ces déclarations, et cela me rendait furieux. Je pensais que plus tard elle deviendrait célèbre, à cause d’un grand succès ou d’une grosse bêtise. Astrid me faisait rêver, j’aimais l’éclat particulier qui l’entourait ainsi que le raffinement de ses apparitions qu’Alexandre trouvait ridicules. Mais je sentais aussi que je ne pourrais pas la gagner aussi facilement que son frère. Au cours d’une fête d’anniversaire, nous nous étions cachés ensemble derrière les rideaux de la chambre à coucher de mes parents. Nous nous serions peut-être embrassés si Alexandre ne nous avait pas découverts et tirés hors de notre cachette.

Alexandre habitait dans une rue large et sinueuse qui s’appelait “Aux jardins houillers”. Pour moi, ce nom symbolisait au mieux la Ruhr, une région industrielle ancrée en pleine campagne de Westphalie. Entre les maisons, séparées les unes des autres par d’assez grands espaces, il y avait des petits jardins, ce qui donnait à la rue, jalonnée de bouleaux, un air vaste et généreux. Notre rue à nous, appelée rue du Puits, débouchait directement sur la porte de la mine. Elle était plus monotone mais très large et recouverte d’asphalte, ce qui convenait parfaitement à nos patins. Pour nos parties de hockey sur roulettes, des branches d’arbres nous servaient de crosses et des boîtes de conserve aplaties de balles.

Il y avait un an et demi de différence entre Astrid et Alexandre. Ils étaient nés en 1949 et en 1950 – « on les a eus », disait leur père que tout le monde appelait “le père Paslack”. Commencer par gagner de l’argent pendant quelques années, puis installer son appartement et enfin avoir des enfants, voilà le cours normal des choses, nous avait expliqué le père Paslack. Après les enfants, ils “ont eu” la télévision, probablement en 1954. Dans notre famille, il fallut attendre la fin des Jeux Olympiques de Rome, en 1960, pour acquérir un premier téléviseur. Jusqu’à cette date, nous allions régulièrement regarder la télévision chez les Paslack.

Le père Paslack qui travaillait dans le même puits que mon père était un pionnier en matière de télévision. Il se dépêchait toujours d’acheter le dernier modèle en date ; il fut le premier dans la cité à avoir un écran convexe, puis un tube cathodique géant, et finalement un téléviseur couleur.

Son corps était maigre et noueux, tout en muscles, sa petite tête ronde était couronnée de mèches bouclées autour d’une plaque chauve. Des yeux étincelants et de nombreuses rides sur un front étroit lui donnaient un air menaçant et intimidant comme si une sourde colère grondait en lui. Son discours était très dense, très précis, il parlait très fort, usant de phrases tantôt hachées, tantôt gauches ainsi que de tournures inhabituelles. Il lui arrivait aussi de se taire pendant un certain temps pour retenir sa colère jusqu’à ce qu’elle explose et se fasse jour dans une cascade de mots. Et il avait de quoi dire sur n’importe quel sujet car il était toujours très bien informé, grâce à la télé.

Le père Paslack aimait tout particulièrement évoquer ses années de guerre en Italie, qu’il présentait comme une grande aventure. Quand le programme de télévision était ennuyeux, il nous racontait comment, dans la descente du mont Cassin, il avait sauté à la dernière minute d’un camion dont les freins avaient lâché. Dans sa guerre à lui, il ne semblait pas y avoir eu de morts ni de massacres, mais il avait connu des relations de camaraderie très fortes comme il ne devait en retrouver que parmi les mineurs.

Il avait aussi eu de la chance pour ses années de prisonnier de guerre. On l’avait transporté en bateau en Amérique et fait travailler dans une orangeraie sous le soleil de Californie où il mangeait du maïs grillé et de la glace à la vanille comme dessert pendant que d’autres, en Sibérie, piochaient le charbon à Vorkouta ou crevaient de froid à Mourmansk. Il aurait même pu rester et prendre en charge une orangeraie, mais il préféra se faire renvoyer en Allemagne pour travailler dans une mine de potasse. Dans le baraquement où on les logeait, il fit la connaissance de sa future femme et ils s’installèrent tous deux dans la Ruhr, le travail dans les houillères étant considéré comme moins dangereux que dans les autres mines. De plus, les mineurs recevaient un quantum de charbon et des cartes d’alimentation supplémentaires.

La mère Paslack, une petite bonne femme toute ronde, dont la façon de parler était aussi ondulée que les cheveux, était originaire des Sudètes d’où lui venaient de nombreuses recettes de cuisine, en particulier de gâteaux ou d’autres mets à base de farine.

Le père Paslack était né à Katowice, un nom que je connaissais, comme ceux de Beromunster, Falun, Allouis ou Hilversum, grâce aux différentes stations de radio indiquées sur notre premier poste dont je ne pouvais m’empêcher de toucher l’œil magique qui brûlait le bout de mon index. Peu avant la guerre de 1939, l’apprenti jardinier Anton Paslack avait fui vers l’Ouest pour ne pas être enrôlé dans l’armée polonaise. Il s’engagea dans la Wehrmacht et réussit le difficile apprentissage de radiotélégraphiste, racontait-il fièrement. Quand son fils Alexandre annonça qu’il n’était pas question pour lui de faire son service militaire, il déclencha une de leurs disputes mémorables.

Au puits, le père Paslack travaillait souvent dans l’eau ou dans la boue jusqu’à la hauteur du genou, exposé à de grands courants d’air. Ces travaux l’avaient rendu malade, ses membres frêles souffraient de rhumatismes ou de sciatique. Mais il aimait son métier, faisait souvent des heures supplémentaires et travaillait parfois jusqu’à seize heures par jour. Chez lui, on disait alors : « Aujourd’hui, le père fait des heures. » Quand il travaillait la nuit, il nous raccompagnait chez nous après la séance de télévision. On aurait dit qu’il voulait se réfugier dans le puits.

Vers 1956, beaucoup d’hommes qui, après la guerre, n’avaient trouvé du travail que dans les mines, tentèrent leur chance dans la Bundeswehr qui venait d’être créée. Le corps du père Paslack était tellement affaibli par le dur labeur qu’il fut déclaré inapte. Il reprit donc le chemin de la fosse tandis que son beau-frère Alois arborait fièrement dans la cité son bel uniforme flambant neuf en comptant les gens qui se retournaient bouche bée sur son passage.

Alois Bitek, le frère de la mère Paslack, était célibataire, avait de larges épaules et un rire tonitruant qui dévoilait plusieurs dents en or. Dans son minuscule appartement qui se trouvait dans une maison proche du Pré aux Chèvres et de la cour de notre école, il avait suspendu au plafond des avions qu’il avait lui-même confectionnés avec du bois de balsamier et peints couleur argent, racontait Alexandre d’un air rêveur.

Alexandre m’emmena chez son oncle un jour où celui-ci recevait la visite d’un Américain. Bitek portait son uniforme, l’Américain était en civil. Sa firme livrait des véhicules au dépôt dans lequel travaillait Bitek en tant que moniteur d’auto-école. À ma grande déception, je n’entendis pas de langue étrangère, l’Américain maîtrisait très bien l’allemand, avec un léger accent cependant. Par ailleurs, il n’avait pas de chewing-gum. Je ne disais pas un mot, je le regardais avec une sorte d’admiration.

Quelque chose me disait en mon for intérieur qu’il fallait devenir tout à fait autre, qu’il fallait vivre d’une manière bien différente, comme si nous venions d’ailleurs, bref qu’il fallait devenir américain. Mais je ne pouvais dire à quoi ressemblerait cette autre vie. Alexandre, lui, savait qu’un jour il irait en Amérique. Là-bas, s’imaginait-il, les familles vivaient en harmonie dans de petites maisons coquettes.

[Extrait du roman Zu spàt für Amerika, Aufbau-Verlag, Berlin, 1998. Traduction française de Nathalie J. Huet]

© Aufbau-Verlag, Berlin, pour le roman © Nathalie J. Huet, pour la traduction française

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