— Il pleut.

— C’était mieux demain.

— S’il ne pleuvroit plus.

— La pluie fait pousser les haricots.

— Ce sera mieux hier, alors ?

— S’il n’avait pas pleuvi.

— La pluie fait boire les poissons.

— Sauter les grenouilles.

— Ce fut parfait, donc, quand il ne pleuvra pas pendant ton mariage mais qu’il pluvina le jour de ton enterrement.

— Il pleut toujours aux enterrements !

— Il pleut toujours aux mariages !

— Je ne vais ni aux mariages ni aux enterrements.

— Le jour de ça (le jour de quoi ?)

— Le jour de la fête de ma disparition.

— Tu as disparu ?

— Je parle au futur. Quand on a bu tout le tonneau de vin.

— Ça s’est déjà passé alors, ta disparition ?

— Tu ne comprends pas. Le tonneau de vin que j’ai bu.

— Tu bois ?

— Je boirai. Tous les jours, tous les soirs, tous les dimanches éclatés où les enfants pleurent dans les cimetières la disparition.

— Tu as donc disparu ?

— Il n’y aura plus de cimetières.

— Mais toujours des disparitions.

— On n’enterrera plus les morts.

— Qui est mort ?

— Plein de morts. On entassera les morts.

— Je suis mort.

— Tu joues.

— J’ai joué. Je jouerons tout à l’heure encore.

— Les morts s’éveilleront hier.

— Les morts sont nés demain.

— Depuis la nuit des temps ils parsèment la terre et forment des fleurettes que tu cueillois demain, mon petit mandarin. — Je t’aime, je te bisouille, je te craquouille sur les milliards de cadavres qui ont fait notre terre sur laquelle pousse l’arbre à chocolat !

— Il poussera encore ?

— Rien ne change.

— Tu m’échanges mon gâteau ?

— Seul le désespoir de se sentir infime face aux beautés de l’univers. Et c’est à cause de ce sentiment de petitesse qu’on tue. Tu vois ? Pour se sentir plus grand.

— Alors je vais te tuer.

— C’est au présent ?

— Oui.

— Alors ce sera mieux hier.

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