Il était tard lorsque K. arriva.

Une neige épaisse couvrait le village.

La colline était cachée par la brume et par la nuit, nul rayon de lumière n’indiquait le grand Château.

K. resta longtemps sur le pont de bois qui menait de la grand-route au village, les yeux levés vers ces hauteurs qui semblaient vides.

Franz Kafka, Le Château Lire la suite


Oranges et citrons, disent les cloches de Saint-Clément, Tu me dois trois farthings, disent les cloches de Saint-Martin, Quand me paieras-tu ? disent les cloches du Vieux Bailey, Quand je serai riche, disent les cloches de Shoreditch.

George Orwell

Crr… crr… crr… crr… Ici Bruxelles… Crr… Crr… Les Européens parlent aux Européens… Crr… crr… crr… Les sanglots longs des violons de l’Europe pleurent dans mon cœur eurotone… Les sanglots longs des violons de l’Europe pleurent dans mon cœur eurotone… Le cresson a étendu ses ramifications… Je répète… Le cresson a étendu ses ramifications… Le parlement a voté la confiance… Crr… crr… Le parlement… crr… crr… confiance… Le marché unique sera florissant… Je répète… Le marché unique sera florissant… Sans Terre n’est pas sans reproche… Je répète… Sans terre n’est pas sans reproche… Crr… Crr… Les ballons se sont envolés… Les ballons se sont envolés… Ici Bruxelles… Crr… Crr… Les Européens parlent aux Européens… Lire la suite


À Yves Boisvert

Il y a l’avant il y a l’après — après c’est irréparable — elle rêve d’être soulevée de bonheur elle rêve d’échapper à sa destinée – deux petites filles qui ne se connaissent pas — la vie est pleine de forêts de terre battue et de palmes le soleil au zénith le ciel purifié sur la savane où couvent les orages sans qu’elle le sache – le soir il y a des chants et des feux des serpents d’un vert émeraude qui coulent dans les herbes sèches parfois on ne mange pas des jours durant et l’eau se fait attendre on est riche du temps qui passe et de la poussière sur les pistes rouges on est heureux tout de même et l’on pleure et l’on rit quand passe la misère il y a des contes qui parlent dans la forêt avec des amulettes et des plantes de sorcellerie, des gazelles et des lions, des hyènes et des varans qu’on ne voit jamais, plus vrais que nature – la case est pleine de rumeurs, ils parlent, ils parlent et c’est mystère — je me demande je ne sais rien – quelle importance on affabule on infibule – ils ont passé la nuit dans la forêt la terre était pleine de cendres ils ont bu des décoctions d’herbes amères et mangé jusqu’à la nausée l’écorce de l’arbre sacré – après les visions sont venues et chacun d’entre nous a reconnu sa vision – la mienne était un oiseau de paradis il volait sur la montagne et sur la mer m’emportant par-dessus la forêt vers des pays inconnus où le ciel était blanc – je me suis réveillée j’avais seize ans et j’étais promise à un homme sur lequel ont passé les outrages du temps dernière des épouses ma jeunesse salie ma beauté jetée jetée jetée aux pieds du tyran Lire la suite