Poème 1
Le grain du cœur,
qui le moudra ?
Nonobstant l’osmose.
Et vice-versa.
Le donjon détruit
ne contient rien.
Poème 2
Mais pars vers l’étalon
qui se presse contre la haie
autour de la maison.
Langue affûtée !
Verte merveille !
Il en est qui usent
à tort de toute parole.
Poème 3
Ne dites plus rien
celui qui souriait.
Dans tel nuage
ou tel visage, voici,
soudain, les mots gelés.
Et les pas le transportent
au-delà du mutisme.
Poème 4
Houppelande d’ombre
s’abat sur ce corps
qui me fait face.
Et je ne peux que trembler.
Où va le vertige ?
Que devient la clarté ?
Poème 5
Cahin et Caha
ne se mentent jamais,
s’étreignent ou s’étripent,
mais mille soleils
font éclater leur cœur
qui bat sans battre,
en ignorant la peur.
Poème 6
Et ce serait maison creuse
comme celle où tu dors
avec candélabres, houppelandes.
Des carreaux opaques,
et la poussière fine !
Autour, un jardin,
l’ombre d’un chien noir.
Poème 7
L’œil ouvert,
tu ne verras plus
ni la suie, ni la cendre,
ni cet émoi sourd
annonçant la rupture.
L’azur béat !
Poème 8
Observe encore
la bibliothèque inondée,
les mots à vau-l’eau,
l’orthographe décapitée.
Le vain espoir !
Poème 9
Deux oiseaux à sinistre
et tempête criant haro !
De quelle cervelle
déchiqueter la moelle,
de quelle fatigue
accepter le poids ?
Poème 10
Reverras-tu l’escroc
qui t’enlace et te point ?
Bouquet de verges
et halos d’échos
quand tu serres contre toi
ton propre cœur.
Poème 11
Que cherches-tu, visage,
dans ce miroir sans visage,
où tu ne verras jamais
les cent visages
qui te donnèrent le jour ?
Poème 12
Nous échangeons nos regards
et une flamme brûle ici.
Les noyers ont tout donné.
L’herbe accueille
l’automne terrassé.
Poème 13
En aveugle, à tâtons,
tu reconnais le buis perdu,
la silhouette évanouie,
les allées et venues
de l’adolescent jardinier
coupeur d’herbe en quatre,
et qui te caresse en vain.
Poème 14
Tout est globe ou cercle
et la famille se noie
dans l’Ourthe à Sy
où tu perdais tes lunettes,
où tu n’étais
que liseron pâle.
Poème 15
Il est temps de jouer
au cerceau, à la tempe, à l’os.
Cerceau qui fait feu
de toute sa rondeur.
Tempe au fond des eaux.
Et os dur à cuire !
Poème 16
Ainsi vient l’époque
de l’insignifiance et de la désuétude.
Rien n’est présent
si ce n’est, sur l’ongle,
ce clair de lunule !
Poème 17
Aphasie est fée
dès que mémoire heurte
geysers et remous
sous la langue et l’œil
qui font naufrage.
Poème 18
Mais l’enfance avait cours
depuis si longtemps !
Mais l’enfance arrive
jusqu’ici dans la chambre
où tu dors sans dormir,
plein d’épouvante !
Poème 19
Corps peu à peu défenestré
qui ne fait que passer.
Jaune d’œuf ou d’œil
piqué de sarcasmes
dès que lune luit
sur crinières et ténèbres.
Poème 20
Car langage a enfermé
coutres et bougres et courges
dans le sens des mots
qu’un torrent emporte
jusqu’à la bouche ouverte
d’une terre avaleuse.
Poème 21
Cracherons-nous noyaux et dents
dès que le soir tombera ?
Non, nous insulterons
toute la nuit
les porteurs de lance-flammes,
les prêtres en leur froc,
les échevins vert-de-gris.
Poème 22
Mais lune arroseuse
inondera nos parcs
et nous avalerons
sucs, fluides, liqueurs,
pour mieux rejaillir
dès le lever du jour.
Poème 23
En arrière et en avant !
Les avirons : la luge et le vélo.
Bouquet de fleurs imputrescibles
et la mère qui embellit
chaque jour le salon !
Vacances ! Âmes et vices !
Poème 24
Le cou douloureux : nerfs !
Ne tourne plus la tête !
Ne fais plus l’enfant !
Garde au poing velu
La poignée d’araignées !