Nous préférons mourir
Nous gisons sous la chute de décembre
les visages couverts de gerçures
la neige commence à nous enterrer
Elle le fait lentement et elle n’a invité personne
Nous gisons anonymes
sans pasteur pour bénir nos noms
sans poignée de terre où retourner
sans psaumes
ni quelqu’un pour les chanter
Nous gisons sous la chute de décembre
nous préférons mourir mais n’y arrivons pas
La neige commence à nous enterrer
Elle le fait seule et elle ne pose pas de fleurs, pas de stèle
pas une seule ombre où reposer en paix.
Ça fait mal quand je pense à toi
Ça fait mal
quand je pense à toi
Ce sont les genoux d’abord
qu’on sort des portes claquantes des bus
et un animal quadrupède sur l’asphalte
Ce sont les cares des bicyclettes
et les pédales
qui se heurtent
et s’emmêlent
dans un enchevêtrement
de métal et de chapines huileuses
et c’est pour les piétons
que je me lève
et les revers
des manteaux, des chevelures
qui se tournent et se retournent
et qui de toute façon ne ressemblent à personne.
C’est un virage sec,
de biais au travers d’une porte
C’est la foule qui se presse à un zinc de hasard
et c’est la cigarette
qui fait qu’un étranger
gratte des allumettes devant ma bouche.
Je suis quelqu’un de très simple
Je suis quelqu’un de très simple
Pas une lignée n’a serré la main
en jurant mon nom
Aucun récit n’a nourri un langage
dans lequel je pourrais poursuivre une idée
Ma naissance n’a rien de divin
je parais non baptisé
et inné comme des déficiences et beautés
dont personne ne peut dire l’origine
Ma présence n’a rien d’extraordinaire
Je ne dérange aucune société
en émettant un doute sur sa raison d’être
Je ne discute jamais avec les générations
de la suite de maintenant et jamais
Je ne connais aucune tradition avec laquelle rompre
et aucune attente à laquelle répondre.
Poèmes traduits du danois par Karl et Jeanine POULSEN.
© Avec l’aimable autorisation de la revue Poésie des Régions d’Europe (Maison de la poésie de Namur)