« Jeanne était au pain sec… »
l’enfant lointaine
la cavalière
Jeanne
treize ans et quelques flèches
un vélo
deux chemins de halage
Jeanne deux mille deux
cent trente années après l’autre
à qui la faute
elle a taggé le mur de l’école
elle a pêché les carpes du voisin
elle a raflé la boîte de Kellogg’s
elle a fait mousser la piscine
elle a forcé le boîtier de la vidéo
elle a
Jeanne Painsec je l’appelle et quand je dis « Jeanneke » elle répond « mais je n’ai pas de queue » et quand je dis « la filouse » elle refile ses yeux verts et quand je dis « tante Jeanne » elle répond « mais je ne suis pas chrétienne » et quand je dis…
Il était une fois Jeanne
des années plus tôt
la frondeuse l’insoumise
sur deux roues dérobées
dans une barque cache-cœur
à l’affût d’un gamin noué
entre deux roseaux tendres
Il est une Jeanne aux deux poings
petite-fille d’un Victor exilé
et d’une Adèle
elle nous nargue, ma Jeanne et moi
jusqu’aux rives de l’Escaut
où nous passons l’éponge
« Jeanne était au pain sec… »
la mienne capture des miettes
des cailloux ravageurs
quelques étoiles pour la soif
elle répète son solfège à tue-tête
elle encercle les chiffres pairs
jette les autres
elle claironne sa leçon d’histoire
en commençant par l’envers
« Ce siècle avait deux ans… »
Note : « Jeanne était au pain sec… » et « Ce siècle avait deux ans… » introduisent deux poèmes de Victor Hugo.