à toi ma page

ami volé des bords d’Asie

frère au juste prénom

 

tu me disais le large et ses lents coquillages

les papiers chuchotés

chiffons ou cerfs-volants

 

la mer t’a rassemblé

en même temps que l’ombre

ma lettre s’époumone

j’épelle

les frontières

 

aujourd’hui mes yeux rament

sur l’horizon défiguré

*

ma bouteille à la mer / a roulé jusqu’aux fanges / jusqu’aux ailes givrées / cent vagues plus loin / le bris de la planète / mille déchirures / un cratère en hoquets / nous n’aurons plus d’anniversaire

 

dans les labos / on parle d’allergie / de coliques fébriles / de ponctions / déjà le teint du monde / vire au gris / et nous sommes dedans

 

j’aurais voulu m’enfuir / sous des plumes musclées / m’accrocher à la course / de quelques renardeaux / tracer / des lignes droites / vers tant d’autres terres / nous voilà plantés dans les rues

 

noire / la flaque aux joues mauves / convoque tous les visages / les silhouettes démises / les bateaux de plastique / sans miroir / et sans ticket retour

 

soleil boueux / nous comptons sur nos ongles / les fêlures / les algues tuméfiées / et ces maisons / qui respirent encore / il faudra dessiner / de nouveaux alphabets

 

entre la plaie et nous / combien de pages perdues / cartes tonitruantes / messages aux écrans morts / bribes / qu’une armature abrite / sous sa vaine casquette / nous ne pouvons

rien pour les mots

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