Messe polyphonique ou friture sur la ligne… Facebook ?

Philippe Remy-Wilkin,

À Arnaud de la Croix

Phil : HALLYDAY MANIA, STOP !

Amaury : Tu vas te faire lyncher ! Même notre philosophe Daniel Salvatore Schiffer s’y est mis, dans Le Club de Mediapart : « Samedi, 9 décembre 2017, midi. La France s’apprête à rendre un hommage populaire, des Champs-Élysées à l’église de la Madeleine, à Johnny Hallyday, disparu à l’âge de 74 ans, emporté par un incurable cancer des poumons, trois jours plus tôt, dans la nuit du 5 au 6 décembre. »

Phil : Les Annales du XXIe siècle ☺

Arnaud : Eh eh ! Des obsèques diffusées en direct sur tous les écrans, la pompe et le cirage de pompes, près d’un million de personnes…

Guy : Épidémie de johnnisse en France ! ☺

Arnaud : Vous participez à la messe consensuelle ou vous êtes un sous-citoyen, un hérétique, un « intellectuel élitiste méprisant les classes inférieures ». Sic !

Amaury : L’ombre d’Herr Dogan plane sur la France ! ☺

Arthur : Les émotions de la foule, ça m’a toujours tétanisé ! Les pogroms, les bûchers, les défilés romains ou hitlériens…

Phil : Je subodore… Cette perception d’un blasphème concerne des milliers de gens ayant défilé sur les mélodies « Je suis Charlie » ou « Vive la liberté d’expression ».

Arnaud : Mauvais esprit ! ☺

Amaury : Je te prépare une bûche, Phil, mais pas celle de Noël. ☺

Laure : Arnaud, vous qui êtes si enclin à pourfendre la bêtise de droite, que dites-vous de la perle de Benoît Hamon, l’ancien candidat socialiste à la Présidence ? Sur Twitter : « Ce matin, c’est un peu comme si Paris perdait sa Tour Eiffel. »

Phil : Sauvé par le gong, le dernier socialiste, le ridicule ne tue plus !

Arnaud : Sinon la classe politique française serait décapitée. D’un autre côté, qui serait à regretter ? ☺

Amaury : Il est vrai que les autres ne sont pas en reste sur Twitter. François Hollande : « Chacun se sent un peu seul aujourd’hui. » Sarkozy : « Johnny va laisser un vide que personne ne pourra jamais combler. » Raffarin : « On a tous en nous quelque chose qui meurt. » Eh bien, non, pas moi !

Phil : Ni moi.

Arnaud : Ni. ☺

Harold : Ces gens qui prétendent parler au nom de tous ! C’est obscène.

Amaury : Ce n’est pas Barbara ou Brassens non plus.

Arnaud : Pas même Michel Berger ou Véronique Samson.

Phil : Ni Gainsbourg ou Polnareff.

Amaury : Manuel Valls : « Le pays s’arrête. » (RTL).

Arnaud : C’est surtout lui qui devrait arrêter. Mais bon, il est à la hauteur de lui-même. Pas beaucoup plus haut que Sarkozy donc.

Amaury : Phil nous bassinait récemment avec sa visite du Palais Rohan à Bordeaux, la salle du Conseil de Monsieur le Maire, et…

Phil : Juppé ?

Amaury : « Que je t’aime, que je t’aime ! »

Phil : Sans voix.☹

Arnaud : Au contraire. Ca en rapporte ! ☺ Non, je me retrouve davantage dans la prise de position d’Alexis Corbière.

Amaury : Et il a dit quoi, le porte-parole de Mélange-les-sons (pour obtenir une cacophonie poujadiste) ?

Arnaud : « La triste mort de Johnny Hallyday ne doit pas nous faire oublier le nouveau mauvais coup qu’ils (= le gouvernement) nous préparent. »

Phil : « Panem et circenses ! ». On distrait la foule de l’essentiel. Ou on la rend plus proche de ceux/celles qui s’apprêtent à l’occire !

Arnaud : Phil, tu vires à gauche. ☺

Phil : Gauche, droite… Ce qui compte, c’est le bon sens, un mélange d’humanité et de pragmatisme. Mais je blablate, là.

Arnaud : Phil qui soutient Corbière !

Phil : 

Arnaud : Tout le monde lui tombe dessus, pourtant. Dont tes amis de LRM. La députée Aurore Berger ne l’a pas raté.

Amaury : C’est l’hôpital qui se moque de la charité ! L’Aurore crépusculaire qui a osé évoquer l’hommage reçu par Victor Hugo en 1863 ! Arnaud, on t’a connu plus pointu question sources. ☺

Arnaud : Eh eh ! ☺ Sinon, Phil, tu es assis ? Macron, qui t’avait ravi par ses prises de position sur le colonialisme ou l’histoire mondiale de la France, il a viré béret/camembert. Je cite ton Jupiter (dans un communiqué publié par l’Élysée) : « (Un homme qui) à travers les générations, s’est gravé (moi, il m’a plutôt gavégrave, soit) dans la vie des Français. (…) De Johnny Hallyday, nous n’oublierons ni le nom, ni la gueule ni la voix, ni surtout les interprétations qui (accrochez-vous !), avec ce lyrisme brut et sensible, appartiennent aujourd’hui pleinement à l’histoire de la chanson française. »

Phil : Bah, consensuel. Avec un trait d’esprit, même.

Amaury : Macron encore : « Il a fait entrer une part d’Amérique dans notre Panthéon national. »

Arnaud : Eh eh ! Le retour de l’histoire mondiale de la France !

Phil : Marine Le Pen appréciera ! ☺ Hallyday, c’est le gars qui déboule vers 1960 et balance : « Oyez, oyez, bonnes gens de France et de Navarre ! Ce que vous écoutez, votre chanson à la française, c’est de la m… ! La bonne et vraie musique, ça se fait là où des petits gars blancs osent frayer avec des petits gars noirs. Elvis the Pelvis is God! »

Arnaud : Phil lyrique !

Amaury : Phil… harmonique ? ☺

Laure : La Présidente du Front National a tweeté : « un chanteur venu du peuple et que le peuple aimait (…) Une pensée pour sa femme et ses enfants, car, si les Français perdent un monument de la chanson, ils perdent un mari et un père. »

Arnaud : Un monument ? Personne ne le connaît aux States ou en Angleterre. C’est un produit local. Contrairement à un Air, un Daft Punk.

Charles : La famille a remercié Marine en lui interdisant l’accès à la cérémonie !

Pascale : En parlant famille, il y aurait bisbrouille entre les femmes de Johnny.

Amaury : Paris Match ?

Pascale : Sylvie Vartan s’épancherait trop dans les médias aux yeux du clan Læticia. Notamment pour faire remarquer que l’île de Saint-Barth, c’est loin pour les proches, cher pour les fans.

Paul : Il avait tout de même le droit de choisir son dernier domicile.

Arnaud : Un chanteur du peuple, dixit Marine ? À voir ! Son public était très mainstream, non ? Il ne me semble pas que Bruel ou Drucker soient la France d’en bas. Et je connais pas mal de notaires, de médecins, d’ingénieurs qui se piquouzent du Hallyday à fond la caisse le week-end ou en voiture. Et il devait y en avoir pas mal dans les 700 bikers du convoi funèbre. Non, ce qui fait sa force, je veux dire sa capacité à être reconnu, c’est le côté transgénérationnel et transgenre social aussi. Il ratissait large.

Charles : Le mythe de la légende ! Dézingué par Finkielkraut. On en parle sur le mur de Nadia.

Amaury : Un mur bien droitier, catholique, tout ça…

Phil : Il faut entendre d’autres sons de cloche.

Amaury : En l’occurrence…

Phil : Trop de gauchos ici, je vais équilibrer mon régime en apport d’idées. ☺

Arnaud : Phil file, je le suis. ☺ Sortons du quant à soi !

(Changement de mur)

Nadia : Johnny ne m’attirait pas particulièrement dans mes jeunes années mais, avec le temps, il m’était venu une certaine tendresse pour le bourlingueur. Et puis… c’est encore un pan de MA France qui s’affale.

Maria : Ah, je ne suis pas la seule. Merci, Nadia !

Nadia : Finkielkraut chez Elisabeth Lévy ! Déjà, sa citation de Proust, L’Éloge de la mauvaise musique, est magnifique. Ce courageux Cassandre, détesté par une certaine gauche, comme jadis un Simon Leys, un Soljenitsyne, pour avoir dit le vrai trop tôt ou trop fort, note que l’hommage national n’a pas touché les non-souchiens, comme il dit.

Arnaud : Ne comparons pas Finkielkraut à un Simon Leys ! ☹

Phil : Non-souchien, un très vilain mot.

Pierre : Qui dit pourtant ce qu’il a à exprimer !

Maria : C’est dire combien cette cérémonie était française et donc… judéo-chrétienne. On devrait avoir honte de nos racines ? Non, Johnny est parti en beauté. Notre civilisation a manifesté une énergie qu’on ne lui connaissait plus.

Jean-Paul : Ça revient ! Il faut y croire. Les manifs contre le mariage pour tous. On ne joue plus les honteux. On relève la tête. Premier pas.

Nadia : Une France unie. Une. Comme dit Finkie, les non-souchiens

Annick : Ce n’est pas la France, MA France, ceux-là.

Nadia : Je suis tombée par hasard sur la cérémonie religieuse. Choc ! Cette communion, les paroles des intervenants… « Aimez-vous les uns les autres ! »…

Annick : Un bouclier brandi contre la barbarie !

Nadia : Ah que… ! Un bémol. La musique de ses chansons. Sans la voix, les paroles, il ne reste pas grand-chose. Ce n’est pas le Requiem de Mozart non plus.

Jean-Paul : Côté paroles, c’était mauvais mais, au fil des années, avec Goldman, Berger, ça s’était amélioré. Grandement.

Annick : Cette union sacrée autour de la Croix ! J’en avais les larmes aux yeux. On ne rêve pas ? Et si… ? J’y vois un signe. Un signe céleste.

Albert : Une hirondelle fait-elle le printemps ?

Marthe : Aurore Filipetti, la leader socialiste : « Johnny était un mythe ! ».

Jean-Paul : Qu’est-ce qu’un mythe ?

Nadia : Au-delà de la voix, de l’interprétation plutôt spectaculaire, a contrario des Birkin ou Hardy, il incarnait quelque chose qui le dépassait.

Nadine : On devinait un homme timide et gentil, que la vie puis les moqueries d’une certaine intelligentsia n’avaient pas épargné. On ne l’imaginait pas faire du mal à une mouche.

Phil : Euh… à quelques femmes sans doute, vu ses nombreux divorces et autres liaisons. Et, par corollaire, à ses enfants, non ?

Arnaud : Eh eh ! Et à quelques inspecteurs des impôts aussi. Et, par corollaire, à quelques millions de citoyens français déplumés, non ?

Odile : L’homélie de Monseigneur Benoist de Sinety, le vicaire général du diocèse de Paris, était sublime !

Nadia : A pleurer !

Arnaud : L’Amour, l’Amour, l’Amour ! Il tartine un max sur le sujet et ça semble vous plaire. C’est sympathique. Des lignes et des lignes. Comme des vignes sur la colline… Inspirée. Moi, je veux bien, mais… Je lis ce qu’il a dit, votre brave vicaire, qui ne pouvait pas s’appeler Benoît, comme tout le monde, Monseigneur Benoist Petit-de : « À la différence de beaucoup d’entre nous, Jean-Philippe Smet n’a peut-être pas reçu dans les premiers instants de son existence cet Amour qui est dû pourtant à toute vie naissante. (…) Mais il avait, un jour de son enfance, entendu retentir au plus secret de son être ces mots prononcés de la bouche même de Dieu (…) : « Tu es mon enfant bien-aimé, en toi je mets toute ma joie ». Hénaurme !

Odile : Beau ! Pauvre de vous !

Phil : Arnaud !

Arnaud : Oui, on sort !

(changement de mur)

Arnaud : Benoist the Beasty Boy (Band ?) : « La vie de Johnny Hallyday, parce qu’elle a manifesté l’Amour, (…) nous invite à lever les yeux vers Celui qui en est la source et l’accomplissement. » Johnny était un prophète !

Phil : Mécréant ! On va te couper la langue ! ☺

Amaury : Avec sa langue bifide, il lui en restera quand même une. ϑ Mais les derniers mots : « Que je t’aime, que je t’aime… » Puis « Amen. » Ensemble, c’est un choc… disons… tectonique.

Arnaud : Et juppéiste. ☺ Moi qui croyais que le rock était subversif, qui ai écouté en boucle adolescent Their satanic Majesty request des Stones… Tout fout le camp ! Ah, je deviens comme Finkie… Merde alors ! ☹

Phil : Si on parlait philosophie…

Amaury : On redescend. Depuis la métaphysique, l’eschatologie, tout ça…

Phil : Je décèle la collusion des deux dictatures. À ma droite, une oligarchie qui détient quasi toutes les richesses du monde et tous les pouvoirs réels. À ma gauche, une masse hébétée qui ne croit plus en grand-chose, veut être rassurée et confie son destin à des bluffeurs experts dans l’art de désigner des boucs émissaires.

Amaury : Ah que… ! ? Phil, tu me fais peur. Tu vas aller plus loin qu’Arnaud et son retour des années 30 ?

Odile : J’ai senti la présence des anges à l’intérieur de la Madeleine. Ils planaient autour de l’assemblée.

Amaury : Nous sommes infiltrés !

Phil : Troll ?

Louise : Vous êtes des pisse-copie et des pisse-froid !

Arnaud : ???

Louise : Vous devriez admirer son parcours. Parti de rien, il est arrivé tout en haut.

Arnaud : Je n’ai rien contre Johnny Hallyday, il y a mieux, il y a pire. Il m’est arrivé de fredonner une de ses chansons, même des plus kitsch, j’en ai apprécié, comme Tennessee, et je connais des gens très bien qui l’adorent, je ne prends pas ses fans pour des débiles. Non. Ce qui est débile ou, au contraire, machiavélique, c’est la récupération et le dithyrambe hystérique, hors de propos, disproportionné.

Loïc : Johnny, on l’entend depuis notre naissance. Il a bercé ou cassé nos oreilles – c’est selon – durant un demi-siècle, il est logique d’avoir l’impression de perdre un proche, de mourir un peu somme toute.

Amaury : La base de l’empathie ! Voir les simagrées de Michel Drucker…

Emmanuel : Simagrées ? Qui êtes-vous pour connaître les relations qui unissaient ces deux hommes ? Un Drucker aurait encore besoin de se faire remarquer ?

Amaury : Je retire le mot s’il vous gêne. Je pensais que les vraies douleurs étaient muettes.

Emmanuel : Qui vous permet de médire ainsi depuis votre fauteuil et votre ignorance. Bah, vous ne parlez que pour les mouches et les araignées.

Amaury : Euh… Merci !

Loïc : Je crois pour ma part que Drucker était sincère.

Amaury : Concerné ! C’est un grand hypocondriaque, non ? Il souffrait de comprendre ce qui l’attend.

Loïc : L’un n’empêche pas l’autre.

Thierry : On mélange tout. La présence des politiques, du showbiz et des fans de base, c’est pas la même chose. Ceux qui l’aimaient, c’est pas à cause de ses voitures de sport ou de son fric.

Phil : Il y a de tout partout. Un politique ou un chanteur sincèrement ravagés par la perte d’un ami ou d’une idole, d’autres qui paradent pour se faire voir, profiter des retombées médiatiques. Et idem avec les d’en bas, comme vous dites, à côté du vrai fan, il y a les curieux morbides.

Arnaud : Et les pervers, les égocentrés narcissiques à dérive cannibale. Qui vont parfois jusqu’à tuer une idole qui n’évolue pas selon leur goût ou dont ils veulent s’approprier une part de gloire. Remember John Lennon !

Claude : Le docteur Cabrol, l’immense chirurgien de la transplantation cardiaque, nous a quittés le 16  juin en toute discrétion. Cette confusion des valeurs ! C. Jérôme, c’est pas Johnny. Johnny, c’est pas Brel ou Lennon. Brel et Lennon, c’est pas Mozart ou Beethoven. Non ! C’est comme le foie gras et le pâté de campagne. Un vin de table et un millésime Château Margaux.

Serge : Les populations ont besoin de héros ! Le rêve est nécessaire quand les conditions de vie deviennent si dramatiques.

Phil : De l’opium pour le peuple !

Marthe : On va enterrer l’éternelle jeunesse de toute une génération.

Amaury : Toute ?

Marthe : Sauf vous, on a compris. Il a marqué plusieurs générations, touché toutes les classes. Il avait nécessairement des qualités au-dessus de la norme.

Arnaud : Grand débat ! Faut tout mettre sur la table. Les non-souchiens de Finkielkraut qui ne suivent pas. L’indifférence quasi absolue du monde non francophone. Qui renvoie aux limites de l’artiste, à une escroquerie de départ. On en a fait chez nous l’inventeur du rock ou un rebelle, il en est pourtant arrivé à conforter une population qui a besoin d’être ancrée et ne s’attache qu’à ce qui est là depuis un certain temps. Comme si durer était une valeur. Ou être ancien, avoir un passé. Pourtant, Drucker dure, Mobutu a duré, Marc Lévy dure, Véronique Genest a duré. Rimbaud n’a pas duré. Schubert n’a pas duré. James Dean n’a pas duré.

Sophie : Ça rejoint la conception du Monde juste, un fantasme qui empêche une grande partie d’entre nous de supporter l’irruption de l’arbitraire, de l’inattendu.

Éric : Se déchirer autour d’un chanteur de variétoches, ça définit un état de civilisation. ☺

Phil : Encore un décliniste, Arnaud ? ☺ Mais ce que dit Sophie est passionnant.

Martine : Ce qui me débéquette, c’est votre mépris pour les sans-dents qui pleurent leur idole en toute sincérité. Vous êtes ce que les Allemands appellent des Nase Hoch !

Amaury : A mort les intellectuels, donc ! Dire « Johnny, c’est pas La Callas ! » =  péché mortel. ☹

Éric : C’est reparti ! On doit respecter les goûts de la France la moins favorisée ou, mieux, les partager, les placer sur le trône du Beau, du Bien, du Bon au lieu d’éduquer, tirer vers le haut comme la télévision des années 60, qui emmenait ma concierge au théâtre, à l’opéra, aux quatre coins du monde. Sur la lancée, on comprendra et respectera la France frontiste. Marine… Euh, Martine, tu ne vois pas le filigrane ?

Maxence : Il ne faut pas nier la débilité de certains fans. S’extasier devant le fait qu’on a vu Hallyday en concert ou été photographié en sa compagnie…

Phil : Bah… Il est bon de s’émerveiller… d’un rien. ☺

Maxence : Je ne parlerai pas des sosies et des collectionneurs ! Des mélomonomanes qui n’écoutent que du Hallyday. Sans se rendre compte qu’ils nient Johnny lui-même, qui vénérait les rockers US et se nourrissait de mille influences.

Amaury : Un État qui rend hommage à quelqu’un qui a refusé d’être un citoyen correct, qui est allé payer ses impôts en Suisse, préférait vivre aux États-Unis ou être enterré à Saint-Barth, ça laisse songeur… C’est pas Anémone, la prodigieuse Anémone du Père Noël est une ordure, qui le balançait dans Le Parisien ? « Johnny, il a fait quoi ? À part se déguiser et mentir ? Voter à droite et fuir le fisc ? Il n’a fait que se marier, divorcer, se marier. C’était un pantin médiatique. » On parle de millions d’euros qui auraient permis de construire ou rénover des routes, des hôpitaux, des écoles… Alors, sans doute qu’Anémone, qui ne supporte plus grand-chose du monde actuel, exagère un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout… mais… je préfère son côté sniper aux ébouriffantes envolées d’un Schiffer : « descendu hier en hélicoptère, comme un homme, vers son public du Stade de France, il s’envole aujourd’hui en avion, vers son ultime demeure, tel un dieu ! ».

Phil : Il se donnait à fond sur scène AUSSI. Le public sent le don. Le gars ou la fille qui se consume, ne trouve son bonheur que dans cette transe partagée. Le syndrome de l’albatros. Il y a du christique là-dessous. ☺

André : Dutronc a dit qu’il souffrait horriblement lors de la tournée des Vieilles Canailles. Il n’a pas fait ça pour le fric !

Amaury : Don’t be cruel!

Phil : Un homme sans doute confus et complexe. Ni blanc ni noir.

Thierry : Vous me faites rire ! Ces fans débiles, comme vous dites, ils savaient ce qu’il gagnait et ce qu’il faisait, ils le comprenaient, parce qu’ils auraient fait la même chose.

Michèle : Vous confirmez le niveau général.

Aurélie : Le fait qu’il n’écrivait pas ses textes et ne composait pas ses musiques pèse dans la balance. Comme ses revirements artistiques au gré des modes. Et son mauvais goût.

Thierry : Quelle condescendance ! À ce compte-là, vous les placez où, Raimu, Louis Jouvet ou Gabin ? Ils n’ont pas écrit leurs films ni leurs répliques.

Aurélie : Quelle confusion chez vous ! Ce sont des comédiens de génie mais ce ne sont pas des génies.

Phil : Comme Léo Messi est un footballeur de génie mais pas un génie non plus. Bergman ou Proust sont des génies, Einstein ou Mozart. Pas Karajan ou Montserrat Caballe !

Aurélie : Et de même avec le concept du héros. Johnny peut être le héros d’une certaine France mais ce ne sera jamais un héros. Un héros, c’est Martin Luther King, Mère Teresa, Gandhi, des pompiers de New-York…

Phil : Et si on passait à autre chose ? Je disais “HALLYDAY MANIA, STOP !” et… on a passé combien de temps à évoquer le chanteur ? ☺

Arnaud : Avant d’aller écouter les Stones ou Springsteen, terminons en beauté et en gravité. Dans le Monde du 11 décembre, Régis Debray évoque sa participation à la commémoration parallèle en l’honneur de Julien Gracq, un des grands écrivains du XXe siècle. Ils étaient… cent. Cent contre un million. Uppercuté, le philosophe entrevoit un moment de bascule qui « marquera nos annales, tel un point d’inflexion dans la courbe longue d’un changement de civilisation », et ce pour trois raisons majeures :

1. le glissement de la graphosphère à la vidéosphère, qui sera lourd de conséquences funestes, car l’image ne peut « saisir l’homme intérieur » et « nous déporte vers le sensoriel et le sensuel », les fausses valeurs de l’apparence.

2. « le début officiel de l’américanisation heureuse », déjà « populaire et quotidienne, mais non encore protocolaire et liturgique », « saluée comme telle par notre chef de l’État », qui a confondu héroïsme et célébrité.

3. « l’institutionnalisation du show-biz, nouveau corps de l’État, sinon le premier d’entre eux ».

Phil : Déclinisme ! ☺

Amaury : Quel jour que ce jour qui vit Phil virer à gauche et Arnaud rejoindre Finkielkraut ! J’y étais ! Je peux mourir ! À moi les anges ! ☺

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