Pauvre enfant congolais

Jean-Chrysostome Tshibanda,

Slam

Pauvre enfant congolais, pauvre enfant africain,

On te donne des coups plus souvent que du pain.

Des coups parfois mortels, et l’on te brutalise

Lorsque tu as volé dix francs dans la valise

Ou lorsque tu as pris, inconsidérément,

Un peu de haricots, sans rien dire à maman !

Souvent il arrive que l’on cherche un prétexte,

En vue de te chasser, surtout quand un « prophète »,

Ou un simple pasteur, te traite de sorcier !

Tu quittes la maison, et même ton quartier…

Quand j’étais un enfant, il n’y avait que la femme

Qui mettait au monde, tandis qu’aujourd’hui même

La rue a des enfants, ainsi que les marchés,

Et ils sont en grand nombre, eux qui se sont fâchés

Avec tous leurs parents, par trop irresponsables,

Mais qui pouvait croire des adultes capables

De brûler sans pitié certains de ces enfants,

Devenus dangereux pour beaucoup de parents ?

N’a-t-on pas oublié enfin cet épisode ?

Ne va-t-on pas choisir encore cette méthode

Quand on ne pourra plus de nouveau supporter

L’erreur de ces enfants, la criminalité ?

Seraient-ils devenus criminels chez leur père,

En étant encadrés par une bonne mère ?

Un vrai sorcier est-il beaucoup moins malfaisant

Quand on l’a exilé et qu’il n’est plus présent ?

Autrefois, les sorciers ce n’étaient pas les jeunes,

Ni les petits enfants, mais les vieilles personnes.

Quel mauvais prétexte, ce terme de sorcier !

La pauvreté aussi : on voit dans tel quartier

Des enfants mis dehors par des parents très riches !

Quelle en est la cause, quand on parcourt les fiches ?

C’est la polygamie, le divorce parfois,

Un nouveau mariage, et ils sont aux abois.

Or, ils n’ont pas cherché à être mis au monde,

Tous ces pauvres êtres, dont chaque rue abonde.

Nul ne peut en douter, la place des enfants,

Qu’il pleuve ou qu’il vente, n’est que chez leurs parents,

Dans leur propre foyer, et non pas dans la rue.

S’ils quittent la maison, ils n’ont pas d’autre issue,

Afin de survivre, que d’endurcir leur cœur.

Pour attaquer autrui, dès lors ils n’ont plus peur.

Ils boivent de l’alcool, et ils fument du chanvre,

Au péril de leur vie, en consommant du poivre

Comme amuse-bouche de prédilection.

Trouver un bon repas ? C’est hors de question !

Ils dorment sur le sol, et à la belle étoile,

Tels des réfugiés, sur leur terre natale.

S’ils volent quelque chose, ils sont emprisonnés,

Mais dans quels cachots donc ? Là où sont amenés

De plus grands malfaiteurs, des cachots pour adultes.

Souvent ils sont battus sans qu’il y ait de tumulte

Et, lorsqu’ils trépassent, leur cadavre est laissé

Sur le bord de la rue. Qui va le ramasser ?

Il faut que se présente un être charitable.

Une telle existence est vraiment pitoyable.

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