« Ici le clocher de l’église Saint-Jacques, Tournai. Les confinés parlent aux confinés… »

Sur son nid de brindilles, Dame Faucon pavane. Les œufs tièdes sont bien gardés, le compagnon vient aux nouvelles entre chaque partie de chasse. Le temps s’écoule, insaisissable. Et dire que certains pensent qu’une mère couveuse, la pauvre, doit forcément s’ennuyer.

De Mexico, de Barcelone, de Québec, de Liège, de Berlin et d’ailleurs, ils sont nombreux à suivre du regard le festin de ce temps qui court pour rien, pour les beaux yeux de quatre fauconneaux en formation continue. L’image de la rapace pèlerine doucement arrimée au clocher fait le tour du monde. Un oiseau confiné, voilà qui devrait être une triste nouvelle, rappelant le bagne des jardins zoologiques, celui des pièges à pie, celui des cages à pinson. Et pourtant, la liberté aérienne demeure lisible comme une aile.

Dame Faucon fait du télétravail. Elle est postée dans un socle élevé de la cité, elle l’habite et le maîtrise. Protégée par les humains d’en bas, elle zoome les possibles proies qui occupent son territoire. Pigeons, étourneaux, moineaux et ratons sont répertoriés, enregistrés. Elle a la mémoire longue des éléphants célestes, la sagesse des matous qui en ont vu d’autres.

La caméra complice de chaque instant relaie les allées et venues du couple jusqu’aux confins de la planète. Nous sommes nombreux à travailler la fibre solidaire qui nous relie aux oiseaux nicheurs. Le pire, c’est que nous évoquons leur patience, leur abnégation, leur amour, alors qu’ils sont, comme nous, simplement en fonction. Ils perpétuent cette espèce, la leur, qui nous épate et nous intrigue depuis la nuit des temps.

Nous sommes jaloux de leur liberté première, nous qui nous croyions encore, voici deux mois, maîtres de nos destinées.

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