Sémira : mort post-industrielle

Adolphe Nysenholc,

« En Belgique, c’est facile. On n’a pas besoin de faire une soumission publique, de choisir entre divers projets le meilleur, de mécontenter des ingénieurs et architectes non retenus, de calculer la résistance des matériaux – le béton le plus étanche -, ni de résoudre le problème de la porte, une adaptation d’une écoutille de sous-marin ou de tank, ni de faire appel à des plombiers chevronnés pour installer de fausses pommes-douches, ni de sélectionner les cristaux des pesticides les plus efficaces, et encore moins d’en vider les boîtes à tête de mort par les ouvertures du plafond, et de couvrir soigneusement celles-ci de leur couvercle pour éviter de laisser échapper la moindre fumerolle…

Non, ici, j’ai tout ça sur moi, dans ma poche, compact, léger, discret, un petit coussin – non pas un coussin d’air -, mon petit coussin, ma petite chambre à gaz portative, économique, propre, simple. Et personne ne peut dire si on avait l’intention d’étouffer ou pas, on ne veut pas de mal, on est là pour aider la personne déportée, à être portée, on veut lui éviter de se donner la peine de crier, on apaise ses velléités de troubler l’ordre, on applique à sa mauvaise humeur le traitement spécial, on l’endort, on n’a pas davantage besoin de médecin que d’ingénieur, on fait tout ça nous-mêmes, on se débrouille, et tout le monde peut comprendre qu’il peut y avoir un accident. La chambre réduite à un petit coussin – pour dormir. »

Partager