Écrit de circonstance s’il en est : le passage du cap du demi-siècle par l’ami qu’on a craint de perdre soudainement, juste avant qu’il y parvienne. Offrande pour une renaissance. Ce ne peut être qu’une parole à laisser monter des profondeurs d’une amitié qui date, elle, d’un quart de siècle. Une parole que la pensée de la mort a brusquement mûrie. Faut-il toujours que les choses de la vie soient exposées au soleil de la mort pour que se révèle la place unique qu’elles ont dans notre existence, pour que leur spécificité trouve en nous licence de se dire, les mots justes où avoir lieu de se partager ? Il est vrai que c’est le trou que fait leur absence dans le tissu de notre imaginaire qui nous les donne à éprouver réelles. C’est non seulement de concevoir la mortalité des êtres, des choses et des liens que nous aimons, mais d’oser lucidement envisager leur mort que nous leur ouvrons les portes de notre vie intérieure, que nous donnons à leur existence la dimension qui lui manque pour nous devenir une présence réelle. Entrer dans l’amitié de la mort nous fait traverser le mur de sa fatalité ; il n’y a qu’elle pour nous initier aux lieux passés et à venir de la seule éternité qui soit : celle de la mémoire. Lire la suite