La mauvaise foi seule expliquerait que, soutenue par les puissants lobbies africains dont s’exerce le despotisme sur l’Amérique depuis l’élection d’un nègre à la magistrature suprême, je m’en tienne à nier le viol dont fut ma victime un homme connu pour investir sa libido dans l’exclusive défense du bien public.

S’il fut soumis par ma faute à une suite ininterrompue d’humiliations ; si sa réputation fut bafouée sans le moindre scrupule moral et plus encore, s’il souffrit dans sa chair autant qu’au plus profond de son psychisme, sans bénéficier de ce baume consolateur qu’eût constitué la plus petite expression de remords dans la bouche de sa tortionnaire ; plus encore, si le calvaire enduré par lui dans la chambre 2 806 fut travesti en son contraire par l’un de ces simulacres dont usent les ennemis de l’État d’Israël quand ils déguisent en persécutés les fanatiques islamistes jouissant de sa sollicitude pour présenter l’État juif comme colonial et raciste, allant jusqu’à interdire l’hypothèse de faire observer quelle écrasante proportion de Palestiniens grouille au sommet des industries de la communication planétaire, toute affirmation de pareille évidence assurant son auteur d’être traîné devant les tribunaux pour complicité de génocide ; il me plaît d’avouer ici quel vénal mobile motivait un tel amas de turpitudes : l’ambition d’une esclave de mater l’esprit des maîtres par une spéculation mystique, en forme de pièce de théâtre, qui serait jouée à la Comédie Française. Lire la suite


Tu imagines et te souviens éternellement. Car c’est encore toi, allongée sur une plage parmi les milliers de coquillages nacrés, dans la symphonie étourdissante des oiseaux, qui présides au destin qui me jettera sur cette terre de hasard.

Toits de palme, peaux de cuivre, boucles d’oreilles en or, visages et corps peints, la parure des perroquets met dans l’ombre le soleil lui-même.

Encore toi qui, la première, vois apparaître à l’horizon trois pirogues gigantesques aux voiles frappées de la croix.

Aux cris et rires de bienvenue exprimant l’innocence de vos âmes, répond le tonnerre vocal du Te Deum ; et, bientôt, la fumée du mousquet, le feu des espingoles.

Ta peau pour la première fois fera contact avec un dard de fer. Lire la suite


As Salamou Alaykoum Wa Rahmatou Allahi Wa Barakatouhou !

Je me présente : Moutanabbya al Ghadeba, la prophétesse en colère, l’une des millions d’enfants de Mohammed l’Immigri.

Prêt à l’abandon total ? C’est ce que tu exigeais de moi voici quarante ans — si tu t’en souviens — dans ma piaule d’étudiante maghrébine à Louvain. De loin en loin j’ai suivi depuis lors ton parcours clandestin. Même si jamais plus tu ne t’es soucié de ce que j’avais pu devenir, c’est avec plaisir que je réponds à ton vœu. Qui sait ? Peut-être ces paroles, jaillies de mon cœur, franchiront-elles une borne que je devine à tes horizons intérieurs. Inch’Allah ! Lire la suite


À la mémoire de Jaime Semprun, mort le 3 août 2010.

Le Jaguëy, c’est un figuier des Caraïbes. Dans le miroir sphérique on le voit rôder à Bruxelles comme aux Cyclades. Il y rêve le jour et veille la nuit tourbillonnant parmi les myriades en fleurs où hier et demain se confondent aux yeux fous d’Habanaguana, son Eva de Cuba. C’est à elle qu’ira, purifiée par l’ordalie de l’eau et du feu, la parole de l’aède assassiné.

Voici l’heure venue, pour Atlas, de parler à l’univers.

Quel basculement s’est-il produit du globe sur son axe ?

Un être en est banni dont l’œil intérieur voyait le Tout du Monde. Créait un théorème interprétant le drame humain global. Qu’un aède grec emprunte le nom d’Atlas ou qu’il prête au titan sa voix, l’un et l’autre apercevaient un au-delà de l’horizon… Lire la suite


Ceux parmi les sacerdotes qui veillaient aux étages du Berlaymont virent un équipage privé de phares et de rétroviseurs auquel manquaient les freins filer sur la rue de la Loi grillant tous les feux rouges dans le fracas des chars débouchant des voies latérales auxquels s’adressaient les coups de sifflet d’une police attentive à verbaliser les piétons s’aventurant sur les passages cloutés dans un nuage de plumes soulevé par le bolide après sa traversée d’un groupe de pigeons égarés sur le bitume dans leur course entre le parc Royal et celui du Cinquantenaire dont se dressaient au loin les arcades surmontées d’un attelage de bronze hennissant de panique face au cyclone métallique dépourvu de toute visibilité par la grâce de ses vitres blindées parfaitement opaques empêchant qui tenait le volant d’apercevoir à hauteur du rond-point Schuman une jeune femme que les sacerdotes aux étages eussent dite bien de son temps — nombril à l’air orné d’un piercing au milieu des tatouages, appareillages électroniques autour de la tête et téléphone portable tenu d’une main contre l’oreille, l’autre main conduisant une poussette pour enfant — si ne l’avait coiffée un casque à l’antique et si n’eût été parée son épaule d’une égide à la mode hellénique — bouclier protecteur bien nécessaire au moment du choc. Lire la suite


Au-delà de toutes les hécatombes, quand viendra l’heure d’offrir digne sépulture aux milliards de victimes, que fera-t-on de ce cadavre-là ?

Je ne sais venue d’où cette idée m’a traversé l’esprit.

Soupèsera-t-on quels avaient été, en ces temps apocalyptiques, les avantages comparatifs de la peste et de la famine, de la guerre et de la mort par moyens archaïques ? Fera-t-on le tri ? Si l’on considérera sans doute que ces quatre cavaliers de la prophétie biblique avaient pu être les principaux destinataires de tous les progrès techniques, par procédés chimiques et physiques appropriés, négligera-t-on dans le charnier les dépouilles ayant connu l’arme blanche ou les simples coups, la corde pour les pendre ou le croc du boucher ?

Et que fera-t-on de ce cadavre-là ? Lire la suite


« jette ton cœur au jeu commun »
Aragon

Quelqu’un m’expliquera-t-il ces nuées de chauves-souris s’engouffrant par un miroir derrière le comptoir et cherchant le repos dans les ombres du bar ? Peut-être suis-je l’une d’elles, auquel cas je ressemblerais à l’emblème célèbre du rhum Evangelista… Pourquoi pas ? Tout était devenu possible des falsifications du réel par l’industrie des fantasmes, en un monde où l’hypnose collective offrait pour héros, aux masses hallucinées, des milliardaires déguisés en chauves-souris…

L’aède se mit à rire devant le jeu d’alternances binaires dont était tissée cette histoire, comme d’un fil blanc et noir évoquant le jour et la nuit, la vie et la mort, l’un des pôles ayant son champion dans l’archange, l’autre dans le dragon. N’était-ce pas de ce dernier symbole qu’on avait tiré le nom du plus célèbre des vampires au cinéma, représenté par un même chiroptère que celui dont s’enorgueillissaient les rhums Evangelista ? Lire la suite


À la mémoire de Claire Lejeune

Une idée juste au fond d’une cave a plus de force qu’une armée.

José Martí

On pouvait faire, cette année-là, le tour du monde pour mille dollars.

Il n’était alors pas interdit de mépriser toute forme de réussite individuelle, de n’éprouver du goût pour aucun rôle social, d’offrir son errance au seul chant d’un fleuve invisible. Chaque jour s’inventaient d’autres mondes, où les plus humbles carrières étaient celles de princes et de princesses d’un royaume englouti – celui des oiseaux et des nuages. Qui n’étaient pas privatisés. L’hymne en avait les accents d’une Internationale cosmique, dont les paroles reliaient à écrire sur les traces de nos camarades Marx et Rimbaud. Si cette haute marée de l’esprit se fracassait contre des digues où retentissaient déjà les vacarmes de John Travolta, de Jean-Paul II et des Nouveaux Philosophes, la corruption des mœurs intellectuelles n’exerçait pas encore une dictature sans partage. La Kommandantur médiatique, du haut de ses miradors, n’avait pas mis au point sa rhétorique victimaire. Jamais les producteurs d’une littérature de gare, n’existant que grâce aux projecteurs, n’auraient osé vendre leurs bavardages magazinesques en se parant du titre d’Ennemis publics. Jamais non plus tel champion des consciences de la gauche n’aurait disputé à un inconcevable Napoléon V « la palme du martyre, la couronne du Christ le plus lapidé d’Europe », car Napoléon IV ne prendrait le pouvoir que deux ans plus tard, et aucun coup d’État situationniste ne pouvait encore décider du sort d’une République. Bientôt les grandes entreprises d’outre-Atlantique, sur injonction de leur Trilatérale, inaugureraient dans les universités des chaires d’enseignement du capitalisme. « Vive la crise », entonnerait un lustre plus tard Yves Montand, sur un scénario d’Alain Minc. « Réfléchissez », susurrerait Catherine Deneuve dans un spot invitant à la privatisation de Suez. J’étais spéculateur sans un rond, misant sur la faillite à long terme de ce système. Aux meilleures grâces duquel, il fallait bien en convenir, je devais ce voyage guidé par la Phénoménologie de l’Esprit. Bagage égaré à Bombay, budget de 10 $ par jour, on fait escale aux antipodes. Lire la suite


Le chemin de l’humanité vers l’humanité ne peut éviter de passer par Cuba
Abel Prieto
ministre de la Culture de la République de Cuba

J’ai dans l’âme un œil qui voit l’avenir, don mystérieux d’une étoile où chaque nuit, jusqu’à ma cime, retentit le cri d’Eva de Cuba. Depuis l’éclair qui engendra la belle Habanaguana – première ancêtre d’Eva – nul n’a connu d’histoire plus mémorable dans le cours entier des âges et des mythes : c’est ce dont, par mes feuilles, il fallait témoigner. Car je suis né moi-même d’une semence astrale tombée de cette foudre. Un arbre vous conseille donc d’écouter bruire le vent dans ses palmes, d’entendre monter de ses racines la rumeur d’une très vieille mélopée. Lire la suite


La vraie démocratie, c’est la souveraineté des arguments.

Brecht

Coude sur fémur opposé, le dos de cette main droite soutenant ma tête à hauteur des lèvres crispées, l’autre main désœuvrée pendue dans le vide au-delà du même genou sur lequel repose mon avant-bras gauche, dans une torsion ramassée du corps où l’esprit se concentre pour jaillir, c’est tout le contraire d’un gisant qui vous parle. Daignez, Sire, écouter votre voisin d’exil sur son trône de bronze, dans l’invisible bond de sa pensée vers des cimetières plus hauts que le ciel. Comme des starting-blocks, le socle où je suis assis cale mes pieds pour ce sprint verbal auquel je me prépare depuis plus d’un siècle. Épaules et muscles des jambes sont prêts pour le cri prophétique, dans ce tournoi de la chair d’où naîtra peut-être une lumière athlétique.

Sous le clocher de l’église de Laeken édifiée par votre ancêtre Léopold Ier, Sire, souvenez-vous de la chute inéluctable de tout royaume depuis Salomon : quand les riches y deviennent trop riches et les pauvres trop pauvres. Il est là, le mur des Lamentations qui s’érige on ne sait venant d’où, détruisant tous les temples au milieu du village et provoquant chez leurs fidèles des sursauts de haineuse colère ; à supposer que les hauts lieux de l’Esprit (ceux où peuvent communier les vivants et les morts) occupèrent jamais un espace équitable sur la place du marché. Lire la suite