Je reçois comme vous, chers confrères et consœurs, le courrier de Marginales, vers le 20 janvier, le millénaire ayant juste un peu plus que deux ans, annonçant le présent numéro : Victor Hugo, c’est nous. Diable ! Serait-ce donc moi aussi, en quelque coin ou tréfonds ? Et me souvenir avant tout du soupir de Gide à la question « quel est le plus grand poète français » : Victor Hugo, hélas ! Lire la suite


Et si les avions du 11 septembre s’étaient écrasés sur les temples de la culture : le MET, le Guggenheim, la bibliothèque du Congrès ? Quelle aurait été la réaction ? WAR ? Question d’école, sans doute… Alors voici, en guise d’hypothétique épitaphe, encore un texte peu connu – ou en tout cas nulle part reproduit, que je sache – d’un autre écrivain, souvent visionnaire aussi : celui de Paul Valéry gravé sur le double fronton du Palais de Chaillot :

 

dans ces murs voués aux merveilles

j’accueille et garde les ouvrages

de la main prodigieuse de l’artiste

égale et rivale de sa pensée

l’une n’est rien sans l’autre

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Sans vouloir gloser sur le lent effondrement de nos systèmes de valeurs, je voudrais rappeler d’autres propos de Malraux sur la création, qui me paraissent aussi importants et aussi peu connus dans leur forme originelle :

  • L’artiste ne se conquiert pas sur la vie, mais sur l’imitation ; toute forme est, à l’origine, la lutte d’une forme en puissance contre une forme imitée.
  • C’est à une lecture, une audition, la découverte d’un tableau que l’artiste connaît ou reconnaît sa nature, ce n’est pas devant la vie.
  • Toujours une forme est conquise sur une autre forme dont elle semble porter la trace. Ni précocité, ni génie ne permettent de rejoindre directement la vie : être précoce, c’est seulement copier plus tôt.
  • On ne passe pas du chant instinctif à la musique, ni du dessin d’enfant à la peinture, ni de la justesse ou de l’émotion de la parole au roman : depuis des siècles, entre l’expression instinctive et l’art, il y a toujours un autre art.
  • On ne devient pas poète par un matin de printemps, mais par l’exaltation d’un poème.
  • L’artiste prend appui sur une œuvre, qu’il entend dépasser. Toute volonté d’artiste commence par un au-delà de, par la conquête d’une conquête. (Premiers fragments de la Psychologie de l’Art, parus dans la revue Verve n° 1, déc. 1937, p. 42)

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Les rappels des paroles d’André Malraux disant : « le XXIe siècle sera religieux ou ne sera pas », n’ont pas manqué au lendemain du 11 septembre. À faux, puisqu’il ne les a jamais prononcées de cette façon péremptoire et sans nuances. Par contre, il a dit exactement ceci, et c’est bien plus significatif quant à son sens de la prophétie :

1° « Le problème capital de la fin du siècle sera le problème religieux » (revue Preuves, n° 49, mars 1955).

Et surtout, quelques semaines plus tard : Lire la suite


Levez les filets d’une sole très fraîche, exempte de mercure ou autres métaux lourds, et aplatissez-les quelque peu. Chauffez fort, par sole, deux assiettes plates au four. Hors four, disposez les filets, finement salés, côte à côte dans une assiette et placez la seconde assiette bien chaude dessus, en pressant légèrement. Au terme d’une minute, vos filets de sole sont cuits.

Chaque convive retire son assiette de dessus et savoure la sole dans toute son authenticité. Une petite pressée de citron – et encore ! –, une gorgée de Chablis ou de Riesling… et le bonheur est complet. Peut-être, mais juste après, un coulis de tomates tièdes, à peine cuites, cueillies une heure plus tôt dans le potager estival. Avec une pincée de ciboulette, pour changer du basilic.

Et sachez combien il est agréable, pour un écrivain, de dire bon appétit autant que bonne lecture !


Ayez par convive un poussin bien dodu, « couvé sous la mère », que vous farcissez simplement d’une cuiller à dessert de beurre salé. Bardez-le de fins zestes préalablement blanchis d’un citron non traité, dont vous couperez les quartiers en morceaux.

Disposez les poussins dans une lèchefrite, avec quelques noix de beurre – ou une lampée d’huile d’olive, à votre goût ou régime –, une cuiller à soupe par poussin de petits oignons au vinaigre, et les morceaux du citron.

Enfournez à 150° et, à mi-cuisson (10 minutes), déglacez avec un verre de vin blanc demi-sec de qualité et ajoutez une cuiller à soupe de sucre fin. Mélangez bien avec une spatule de bois et arrosez fréquemment le volatile jusqu’à fin de cuisson (environ 10 minutes de plus). Le jus doit être onctueux, à la limite du sirupeux.

Servez avec des grenailles sautées à la graisse d’oie ou de canard. Vin : un Bourgueil frais.

Et sachez combien il est agréable, pour un écrivain, de dire bon appétit autant que bonne lecture !


Faites main basse sur une belle pomme extra-fraîche de ris de veau, dont vous aurez si possible surveillé vous-même l’élevage printanier en pâture, au flanc de sa mère. Dégorgez-le, blanchissez-le, parez-le, mettez-le sous presse pendant une heure.

Pendant ce temps, vous avez tout loisir de nettoyer les morilles fraîches de Savoie, de les couper en deux dans le sens de la longueur. Faites-les doucement cuire à couvert dans une poêle avec du beurre demi-sel pendant une dizaine de minutes.

Escalopez les ris en tranches de deux centimètres, que vous faites revenir parmi les morilles pendant dix minutes encore. Déglacez avec un demi-verre de Pineau des Charentes blanc, et noyez gentiment le tout avec de la crème fraîche double. Envoyez à début d’ébullition.

Servez avec du pain de mie frais, qu’on écrase dans la sauce pour la pomper sans vergogne, et avec un grand vin, mousseux, blanc ou rouge.

Et sachez combien il est agréable, pour un écrivain, de dire bon appétit autant que bonne lecture !