Alors, c’est ça, qui vous monte à la tête ?

On tire la langue, on se remplit les mirettes… (ça vous épate ?)

Y en a pourtant, de l’argent sur l’eau qui brille,

Y en a pourtant de la joie au creux des filles à bas les pattes !

N’y touchez pas… gardez vos rêves

N’y touchez pas… gare au bonheur

… Toi qu’a la fringale,

Prends l’or des étoiles,

Touche pas Lire la suite


— Long au moins jusque-là, imaginait Samantha en désignant ingénument à son amie Gina le dessous de son nombril qui, bien que serti d’un adorable petit brillant, apparaissait très dénudé sous le minuscule top moulant.

Puis, se tournant vers moi, dans un sourire ravi :

— Ça m’irait bien, vous ne trouvez pas, Monsieur Vandersteen ?

Et ses yeux mi-clos, ses lèvres entrouvertes faisaient que ce sourire semblait être un baiser.

* Lire la suite


Je suis dans le noir. Enfermée. Je ne respire pas. Le seul air ici, c’est l’odeur de leurs chaussures. Je suis dans le noir et je vais mourir. De toute façon, je m’en fiche. Je ne veux pas de leurs mokas et de leurs babas. Et c’est moi qui décide si je suis comme les autres.

*

— Voilà, Jeanne ! Tu vas pouvoir méditer à l’aise ! a dit mon père et il a fermé la porte.

Jeanne. Toujours Jeanne. Jamais Jeannette ou Ma petite chérie ou Ma petite Jeanne. Mais seulement Jeanne. Jeanne comme jette et comme gifle. Quand je suis née, Louisette avait pris tous les noms gentils. En vrai, ce n’est même pas Louisette, d’ailleurs. C’est Louise. Lire la suite



Décidément, le cyclisme, ça me poursuit. Pourtant, j’y ai renoncé. À quinze ans. Lors de mon anniversaire.

— Un vélo ? Tu veux un vélo ? Qu’est-ce que tu vas faire d’un vélo ? Tu veux faire le Tour de France sans doute ? Tu veux battre Eddy Merckx ? Je te préviens, Charlotte ! Ne crois pas sortir d’ici sur un vélo ! Tu n’iras pas à la rue là-dessus ! Alors, un vélo pour rouler en rond sur l’herbe du jardin, si tu veux ! Mais ça ne roule pas bien sur l’herbe, un vélo, n’oublie pas ça ! C’est toi qui vas tondre le gazon ? C’est toi qui vas passer la tondeuse chaque jour pour que ça roule bien ? Et abîmer la pelouse ensuite avec les roues d’un vélo ? Lire la suite


À Philippe, Michel, Robert, Mireille, Serge, Micheline, Daniel et quelques autres, dont certains — ils s’en souviennent — allaient suivre le catéchisme,
en français, à Dilbeek, dans la paroisse la plus proche de notre petite école,
là où, comme partout alors aux alentours du Luizenmolen ou dans les prairies
de Scherdemael, de Vlezenbeek, de Lennik et de Neerpede, nous étions chez nous.

Quo vadis, Belgica ? Pardon ? Ah ! C’est du latin ! Vous m’en direz tant ! Mais nous n’apprenons pas le latin ! Nous avons déjà assez avec le français et le flamand ! Vous savez, nous n’avons que huit ans ! Un livre ? De Sienkiewicz (1) ? C’est rigolo comme nom. Redites-le pour voir ! Un film (2) ? Oui, bien sûr, nous allons au cinéma. Le dimanche matin, au Métro, rue Wayez, avec les tickets de la Croix-Rouge. Mais Quo vadis ? comme vous dites, ça, nous n’avons jamais vu. Ça raconte quoi, d’abord ? Ah ! Une histoire avec Jésus ! C’est pas de chance. Jésus, vous savez, ici, on n’en parle pas beaucoup. C’est l’école laïque. Nous, ce que nous voyons au cinéma, c’est des histoires avec « Den dikke en den dunne (3) ». Comment ? Vous ne connaissez pas « Den dikke en den dunne » ? Enfin, Laurel et Hardy, vous ne connaissez pas ? Ah bon ! Quand même ! Oui, ici, c’est comme ça qu’on dit : « Den dikke en den dunne ». Nous sommes à Bruxelles, non ? Nous ne faisons pas tellement de manières avec les mots. Nous ne disons pas « poil aux bras », d’ailleurs, ni « poil au nez ». Nous ne sommes pas si stijf (4). Chez nous, c’est « zotte boma (5) », « scheile Marei (6) », « stoeme Josei (7) », « slume Sophei (8) » et tous des trucs comme ça. Ça dépend évidemment de ce qui doit rimer avec. Mais il faut nous excuser. Nous n’avons pas le temps de rester discuter. Nous devons aller préparer la fête de la commune. Déjà que nos récréations sont raccourcies ! Lire la suite



C’est une femme. Elle est empaquetée. Buste, bras, épaules, tête, visage, tout est emballé. Une femme. Un cocon. Un ballot. Un colis ficelé. Une femme vivante. Elle attend.

L’image est heurtée, imprécise, subreptice. Une prise de vue clandestine. Mais je distingue bien la femme enveloppée de linges, debout, seule, immobile, au centre d’un cercle d’hommes. Soudain, dans le champ visuel, à une dizaine de mètres, un second spectre blanc, identique au premier. Une autre femme sans visage. Une momie. Inerte sous les cris.

Le son est imparfait, chancelant. Les cris, incompréhensibles. Mais leur inflexion est agressive, gutturale, hargneuse. Dans le lointain une voix mâle, nasillarde, chante dans un micro de languissantes incantations. Sur un ton aussitôt soumis, monocorde, les hommes en cercle répètent machinalement les dernières syllabes de cette prière. Entre les dévotions, ces mêmes voix, à nouveau haineuses, exaltées, véhémentes, vomissent des injures. Lire la suite


Rideau de velours pourpre. Lustre aux cinq cents lumières. Parfums fleuris. Visons. Rubis. Smokings. Du monde. Dans les loges. Les corbeilles. Les baignoires. Au parterre. À l’orchestre. Sur chaque strapontin. Et jusqu’au paradis. Du monde au balcon aussi. Armatures. Dentelles. Machinerie. Feux de la rampe. Push-up et Wonderbra. Ça pigeonne pas mal. On veut se laisser prendre.  Lire la suite


Non, pas le sept ! Ne me parlez pas du sept ! Il n’amène rien de bon ! Regardez : les septicémies, les sceptres, les ascètes, les sceptiques… Je m’en passe ! Le sept est un chiffre austère, intransigeant, sévère. Comme Septime, d’ailleurs —vous voyez bien que j’ai raison : déjà les Romains le disaient ! Lire la suite