Un liséré de nacre mue en estampe les branches du V que dessinent entre leurs pentes les monts Q’arâm et Fu-tôg. Soyindâ suspend sa marche. De la pointe inversée fuse un pinceau, pareil à ces cavaliers dont la tumultueuse avant-garde annonçait jadis au peuple de Melgôr la venue de l’empereur. Lire la suite




La neige sied mal aux rhumatismes. Les oreilles closes au radotage des vieux, enfin des autres vieux, et le nez collé à la vitre, j’ai laissé fuir une matinée blafarde, à contempler dans le flou de mes pauvres pupilles le carrefour entre les avenues Brillat-Savarin et du Général-Médecin Derache, où d’évanescents fantômes glissaient entre les flocons. Lire la suite



Au Salon du livre de Québec se tient le sempiternel débat sur les relations Nord-Sud. « Mythe ou Réalité », se rengorge l’intitulé, comme si le mythe n’était pas l’expression des réalités indicibles. Un fonctionnaire international dont la compétence n’a de pair que l’altruisme a brossé le tableau prévisible des rapports inégaux et mes oreilles se mettent à siffler quand un érudit oppose la tradition du Sud, orale bien entendu, à celle du Nord, écrite comme il se doit, assenant à l’auditoire la sentence éculée : « Quand un vieux meurt en Afrique, c’est une bibliothèque qui disparaît. » Lire la suite


Quatre fois par semaine, j’emprunte à la station Anneessens le tram 56 de très approximativement 13 h 24 pour aller tenir une consultation de médecin-conseil au square Albert 1er. Mes confrères, accros de la bagnole, ne me voient jamais partir sans me souhaiter avec des trémolos bonne chance et bon courage, comme si je m’enfonçais en diligence dans les territoires d’Apaches sur le sentier de la guerre. Il est vrai qu’embarquant dans le ventre de la place où se tient chaque soir le marché du sexe homosexuel, je ne sors du tunnel que pour traverser le quartier de Cureghem, un des plus décriés de la capitale, réputé lieu de tous les trafics, arrachages de sacs et autres car-jackings. Lire la suite


Brutalement assaillis, les marronniers lâchent une dernière salve qui balaie le trottoir, se mêle aux tourbillons de poussière, aux débris de verres, aux éclats de pierres et de briques, aux immondices de quinze jours, teintant l’asphalte d’une riche pourriture. Baroud d’honneur ! L’hiver a investi la place ; une autre nuit de tempête, et il l’aura conquise. Lire la suite


Ça y est, le revoilà derrière son journal ! Ça me fait tout drôle qu’il me regarde ainsi par-dessus la sale gueule de Dutroux. Marre de voir ce minable en première page, et leur baratin, complicités, dysfonctionnements, gestes forts, quand je pense aux enfants qu’on égorge en Algérie, si les ministres y démissionnaient à tous les coups, leur gouvernement tournerait si vite qu’ils pourraient l’utiliser comme ventilateur ! Allez, Yasmina, trois fois que tu reprends ton paragraphe ! Ce mec me perturbe, trop beau vraiment, j’ai rêvé de lui, comme dans les contes, un cheval nous emporte, moi blottie contre lui qui m’enserre, ses yeux bleus comme la nuit, pleins d’étoiles dorées, tout mon corps bouge au rythme de la croupe, doux, souple, puissant, vagues de la mer, de plus en plus… Rien qu’à y repenser, je me sens rouge comme du harissa.

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