Ville vide. Totalement vide. Iblis n’avait jamais connu sa ville sous ce jour. Agoraphobe, solitaire limite misanthrope, asthmatique, Iblis respirait cette atmosphère nouvelle avec gourmandise. Certes avec une pointe de culpabilité, lorsqu’il pensait aux nombreuses victimes de tous âges, de tous rangs, de toutes appartenances, mais son corps ne pouvait tricher. Il revivait. Finis ses parcours matinaux et vespéraux dans une rame de métro bondé de navetteurs, finis les bousculades et les regards vides ou méfiants, finis ces relents de kérosène et de malbouffe. Du jour au lendemain, le monde s’était mis au ralenti. Le vacarme des hommes avait disparu au profit des chants d’oiseaux, en particulier dans les artères où les embouteillages paralysaient la circulation. À l’arrêt, les courses précipitées de ces urbains qui vivaient une urgence quotidienne et permanente, apparemment nécessaire à leur équilibre. La ville, tout à coup, soupirait d’aise au point que la qualité de l’air en tirait les bénéfices. Lire la suite