Cher JDD, salut et amitié,

Le salut, je te le dois depuis cette rue de l’Est à Bruxelles où, voici plus de vingt-cinq ans, tu me reçus avec la même curiosité amusée, la même gentillesse courtoise et le même regard radioscopique qu’aujourd’hui à Paris, où je puis, à mon tour, te recevoir tel qu’en toi-même… Lire la suite


À l’âge de cinquante ans, le père de Rachel brillait comme directeur à la tête d’un service de pointe dans la Compagnie ferroviaire du pays. Régulièrement, pour le récompenser de son travail exemplaire et parfois de son zèle qui ne lui attirait pas que des amis, on lui remettait discrètement des coupons de chemin de fer. Il revenait alors à la maison, fier et tout excité à l’idée d’emmener bientôt sa petite famille en excursion. On attendrait un dimanche ensoleillé, on préparerait un pique-nique, on délogerait le panier d’osier du débarras de la terrasse, on partirait dès l’aube et l’on chanterait dans le compartiment en espérant le voisinage de convoyeurs sympathiques. Destination ? Un camp romain, une grotte, un parc d’attractions, une plage au bord d’un lac de barrage, un musée de vieilles voitures furieusement chromées. Lire la suite


Naar de plek van mijn geboorte ben ik teruggekeerd, naar Brussel, nu alweer jaren geleden, kijk toch eens, de kinderen zijn intussen groot geworden. In deze tweetalige, veeltalige stad schrijf ik boeken in het Nederlands. Dat ik die taal omarmd heb is haast een toevallige bij-komstigheid. Had mijn vader indertijd die baan in Utrecht niet gekregen, dan had ik nu vermoedelijk Frans gesproken, al is ook dat weer niet zeker. Ooit is Brussel uit een moeras gekropen, vergeet dat nooit ; de talen glijden hier uit en klampen zich aan elkaar vast.

Anderen schrijven hier Franse boeken. In de kranten lees ik recensies, ik zwerf langs de rekken van « Tropismes », ik ken dus hun namen. Het zijn tenslotte collega’s, niet, en we schrijven vaak genoeg over dezelfde straten. Maar ken ik ook hun gezichten? Hun stem, hun tongval? Lire la suite


« Wer schnell schreibt, muß lange nachgedacht haben », sagt er, und knallt kaltlächelnd in den Computer, was manch anderer nur mühsam in Worte zu fassen vermag. « 15 Minuten Arbeit plus 20 Jahre Erfahrung » meint er dazu lakonisch – und wird im nächsten Moment lyrisch, weil ein Klempner uns aus dem überfluteten Keller rettet. Zum Dank schenkt er ihm ein Bild seines Vaters. Das ist typisch für ihn. Lire la suite


C’était un lundi soir. Ils étaient assis l’un en face de l’autre dans un adorable restaurant, près de la place Brugmann. Il n’était pas difficile de deviner qu’il s’agissait d’un père et de sa fille : elle était son portrait craché.

Ils passaient apparemment une soirée délicieuse. Leur ressemblance était frappante, mais bien moins que leur complicité. Ils parlaient de tout, partageaient des confidences, évoquaient des souvenirs, riaient de futilités, débattaient de sujets sérieux.

Chaque fois que je les ai vus, j’ai eu l’impression d’assister à un moment magique. Pourtant leur entente était simplement sincère. J’ai juste vu deux personnes sur la même longueur d’onde, une relation authentique, tout le temps.


C’est trop facile de toujours compter sur le sacrifice des meilleurs d’entre nous pour asseoir le triomphe de notre médiocrité… Trop facile de leur demander – sans le dire, pour n’avoir pas à les remercier – de renoncer à ce qu’ils pourraient être pour faire advenir ce que nous ne pouvons devenir seuls. On dit, dans la littérature, qu’il est plus simple de donner que de recevoir : cette phrase ne peut qu’être formulée par ceux-là mêmes qui ne donnent rien. Pour s’offrir, de surcroît, le manteau du sacrifice volé à leurs généreux donateurs. Et puis voilà, il y a le temps et ses accrocs, la vie qui ne glisse pas comme la Meuse, long fleuve tranquille et sale à la liberté brimée, endiguée. Il y a des accidents, et pour beaucoup la peur de perdre un allié utile, pour quelques autres, la brusque découverte d’être passé si près, trop près, de la perte d’un ami précieux. Un grand Jacques l’a dit, ou presque : « C’est trop facile quand une amitié se meurt / Qu’elle craque en deux parce qu’on l’a trop pliée / D’aller pleurer comme les hommes pleurent / Comme si l’amitié durait l’éternité »… Lire la suite