Ludovic Bonneff a épousé Georgette Lagasse parce qu’il ne l’aimait pas. Il l’a fait à l’église Saint-Job et à la maison communale d’Uccle, et par deux fois, devant le curé et devant le bourgmestre, il a juré qu’il lui serait fidèle et qu’il serait toujours à ses côtés « jusqu’à ce que la mort les sépare ».

Il a sa petite théorie sur le mariage : si on n’aime pas la femme qu’on épouse, on n’éprouve aucun scrupule à la tromper et on n’est pas rongé par le remords. Lire la suite



Le Grimod, rue Franklin à Bruxelles, derrière le siège des institutions de l’Union européenne : c’est ce qu’on a pris l’habitude d’appeler un « établissement branché », ce genre de restaurant, dont on trouve les brillantes publicités dans de luxueux magazines en couleurs, qui le sont tout autant et qui vous font croire, d’une manière sournoise, vicieuse et pavlovienne, que la vie est une vallée de plaisirs perpétuels – limousines allemandes, voitures de sport britanniques et 4×4 nippons, montres suisses High-Tech, vêtements griffés, caviar, foie gras, huîtres Gillardeau, truffes d’Alba et sushi à profusion, champagnes millésimés, grands crus classés de Bordeaux et vieux climats de Bourgogne, lingeries sexy (féminines et masculines), déco design italienne et scandinave, apparts (belges) de trois cents mètres carrés avec « vue imprenable » à deux pas de la forêt de Soignes ou à trois, à peine, de la réserve du Zwin, et j’en passe. Lire la suite


Il y a les marxistes tout court, les marxistes-léninistes, les socialistes marxistes, les trotskistes marxistes, les maoïstes marxistes, les castristes marxistes, les situationnistes marxistes, les post-marxistes, les néomarxistes, les pseudo-marxistes, les crypto-marxistes, les ultra-marxistes, les latinos marxistes, et que sais-je encore.

Moi, je suis freudo-marxiste. Je suis partisan de la psychanalyse de Sigmund Freud et, en même temps, des théories philosophiques, économiques et politiques de Karl Marx. Je les associe. Je les combine. Je ne vois pas la libido sans la société, et à l’inverse, je ne vois pas le capital sans l’un ou l’autre complexe.

Dont celui d’Œdipe. Lire la suite


Je m’appelle Sébastien Monselet et je suis le président de l’Amicale des Sosies Chanteurs, une association sans but lucratif, qui compte quarante membres et qui a été fondée en 1987 par le sosie de Serge Gainsbourg, le défunt Julien Rosier que j’ai bien connu et qui était contremaître chez Michelin, à Clermont-Ferrand. Après sa mort, Julien Rosier a été remplacé par le dénommé Jean-Marc Le Quintrec, le sosie de Claude François, un dentiste de Charleville-Mézières. Lire la suite


Tout a commencé le jour où, pour la première fois, j’ai entendu à la radio le nom d’Emmanuel Macron.

J’ai sursauté. J’ai d’abord cru qu’il était question de moi, puisque je m’appelle Manuel Macron, avant de me dire que c’était impossible.

Pourquoi parlerait-on de moi à la radio ? Qu’est-ce que je suis ? Je ne suis rien – rien qu’un brave pharmacien de quartier, au nord de Lille, rien qu’un bon mari et qu’un bon père de famille, rien qu’un bon fils soucieux de la santé de sa mère, rien qu’un amateur de tir aux clays ne se débrouillant pas trop mal, mais sans pour autant être capable de briller dans les divers tournois organisés par les clubs du département.

J’ai tendu l’oreille. La journaliste présentait Emmanuel Macron comme un des plus jeunes et des plus brillants conseillers de François Hollande, très calé en économie et ayant quelques excellentes idées pour assainir les finances de l’État. Lire la suite


On ne présente plus Désiré Dudu, que certains surnomment DD ou Dédé.

Lors du seul et unique voyage de quatre jours que j’ai effectué dans son beau et vaste pays, j’ai eu l’occasion de constater à quel point il était populaire, à quel point il était aimé par son peuple, et surtout à quel point il était chéri et adoré par les femmes. Les statistiques prétendent que quatre-vingt-cinq pour cent d’entre elles votent pour lui depuis des années et des années – en fait, depuis qu’il est arrivé au pouvoir, il y a plus de trois décennies. Lire la suite


Aux amis de Georges Simenon

Depuis que la NASA a lancé sur le marché la machine à remonter le temps, la vie terrestre – dois-je le rappeler ? – a changé de fond en comble. Tout le monde veut remonter le temps. Tout le monde veut entreprendre au moins un voyage dans le passé, et tout le monde a d’excellentes raisons de le faire, d’être projeté à telle ou telle époque, proche ou lointaine, de l’histoire de l’humanité. Le slogan commercial de la NASA est bougrement malin : « Voyager dans le temps, c’est retrouver le bon vieux temps. » Lire la suite


 

L’aire de repos de La Belette était située à un kilomètre environ du café que tenaient mes parents à La Roche-sur-Selle, non loin de l’échangeur en trèfle de Villeneuve. On y accédait en prenant la route de Sainte-Barbe, après avoir longé un petit bois (on l’appelait le Bois du Pendu) et traversé un champ de betteraves. Elle était entourée d’un grillage, mais il y avait moyen de s’y introduire sans trop de difficultés en passant derrière les toilettes. Insouciante, le cœur léger, je m’y rendais assez souvent, en général en fin d’après-midi.

La Belette était surtout fréquentée par des routiers venus des quatre coins de l’Europe. J’en avais repéré quelques-uns qui s’y arrêtaient à intervalles réguliers et avaient leurs habitudes. Ils formaient de petites bandes de copains heureux de se revoir, de discuter ensemble, de boire un coup, de jouer aux cartes, aux dames ou aux échecs. Lire la suite