Il était une fois, il y a bien longtemps, perdu dans les brumes du Nord, un petit royaume où chacun vivait en paix. Un roi débonnaire y présidait aux destinées d’un peuple aimable et sympathique ; il était bon vivant et joyeux drille comme la plupart de ses sujets. Autour de lui gravitaient une nuée de princes et de princesses aux intérêts les plus divers. L’un d’entre eux, par exemple, portait le plus grand intérêt aux chiens du royaume, ce qui lui valait la sympathie d’une importante partie de la population. Les reines quant à elles étaient choisies en des contrées lointaines et exotiques, afin sans doute de renouveler le sang royal ; elles parlaient allemand, suédois, espagnol ou italien. Les princesses et les petits enfants royaux avaient des cheveux blonds comme dans les livres d’images, même celle qui ne présentait pas toute la légitimité souhaitée. Car les rois après tout ne sont que ce que nous sommes. Lire la suite


Je m’ennuie.

Tout le monde s’ennuie. Les gens s’emmerdent, de plus en plus. Se font chier. N’en ont rien à cirer, de rien. N’en ont rien à branler.

Il faut m’excuser, je suis quelquefois grossier. Cela dépend des circonstances, du contexte. Du moment aussi. Et de ceux à qui je m’adresse. De toute façon, quelle importance ? Je m’en fous, comme je l’ai dit plus haut en termes plus explicites. Lire la suite


La Terre se mourait, et avec elle la plupart des espèces qui la peuplaient. À l’exception des insectes, bien sûr, de quelques poissons au fond des abysses, des grands crocodiles qui proliféraient dans les eaux des lacs africains tant la charogne en ce temps-là y était abondante, et d’autres choses plus ou moins vivantes, toutes dotées d’une formidable faculté d’adaptation. Lire la suite


Cinq cents millions de dollars. Ou cinq cent ? Rappelez-vous : Les déterminants numéraux cardinaux sont invariables, à l’exception de « vingt » et « cent » qui prennent la marque du pluriel quand ils sont multipliés et qu’ils terminent le numéral cardinal, comme dans « quatre-vingts » ou dans « cinq cents ». D’accord, mais qu’en est-il lorsqu’il s’agit de 500 millions, voire de 500 milliards ? Lire la suite


Bon, d’accord, tout le monde s’en fout. Qui, d’ailleurs, sur la planète, pourrait bien s’intéresser à cet improbable royaume d’opérette, 30 528 kilomètres carrés à tout casser pour 10 millions d’habitants, trois régions, trois communautés (qui n’ont pas grand-chose à voir avec les régions susmentionnées), dix provinces, des Fourons, un arrondissement Bruxelles-Hal-Vilvorde, un roi, deux reines, un prince héritier contesté, un autre rejeton royal rêvant d’être vétérinaire et dont l’improbable amitié avec un médiatique prêtre-motard aux doigts chargés de bagouses n’a pas fini de faire jaser, une fille illégitime qui ne se prénomme pas Mazarine, une cinquantaine de ministres, un hymne national dans lequel il est question d’invincible unité, une devise proclamant fièrement que « l’union fait la force »… Lire la suite


En ce temps-là, les choses étaient bien différentes de ce qu’elles sont aujourd’hui. C’était un autre monde…

Il y avait de la neige au sommet du Kilimandjaro, et des animaux actuellement disparus vivaient dans le Grand Nord, sur d’immenses blocs de glace agglutinés autour du pôle. Ce n’était pas vraiment un continent même si l’étendue de cette chose que l’on appelait « banquise » était à peu près aussi vaste que l’Afrique. Dans l’hémisphère septentrional, de nombreux pays bénéficiaient d’un climat tempéré : hivers relativement cléments, étés sans excès et parfois pluvieux.  Lire la suite


Couché très tard, ou très tôt, c’est selon. La télé, zapping de chaîne en chaîne, d’abord les info puis des feuilletons à la con, Les Experts, meurtres et cadavres que l’on ausculte. Bistouri, ciseaux, scalpel, gants de latex blanc, microscope. Taches de sang, taches de sperme, meurtrissures, lésions, traces d’étouffement, de strangulation, de viol. Dans l’estomac les restes du dernier repas, ingéré il y a très précisément trois heures vu l’état de la digestion. Lire la suite


La foule, essentiellement féminine, se pressait devant les grandes portes encore fermées, comme pour un concert à Forest National aux temps mythiques où chanteurs et groupes de rock déplaçaient les masses. Les hommes en armes du service de sécurité circulaient, nombreux, canalisant la meute, et l’on sentait bien qu’ils n’hésiteraient pas à employer la force en cas de nécessité. Un peu plus loin, des autopompes et des combis de gendarmerie stationnaient tandis que plus loin encore, l’armée se tenait prête. C’est que plusieurs des conférences de celle que l’on appelait Carla Marxi (sans que personne ne sût si ce nom était vraiment le sien) avaient dégénéré en émeutes parfois sanglantes. Lire la suite


J’ai eu beaucoup de difficultés à la retrouver. Cela m’a pris des années et, pour tout avouer, à la fin de ma quête, je n’avais plus vraiment d’espoir. Tant de temps s’était écoulé… En outre, les pistes avaient été volontairement brouillées. Noms de lieux, patronymes, prénoms même, tout était faux. Il m’a fallu remonter à la source. Me pencher sur les registres de l’Institution où le coupable était resté interné jusqu’à la fin, réécrivant sans trêve son histoire dans ces cahiers d’écolier qu’il affectionnait, d’une petite écriture de plus en plus illisible. Pour cela, je devais bien entendu connaître son nom, le nom réel de cet Humbert Humbert devenu si tristement célèbre. L’enquête a été longue. Non sans peine, j’ai fini par obtenir de son éditeur qu’il me confie qui était vraiment le fameux pédophile littéraire. Il m’a fallu montrer patte blanche, me prévaloir de mes diplômes de médecine générale, psychologie, psychiatrie, psychopathologie et science des syndromes post-traumatiques, pour ne citer que les principaux… J’ai dû longuement expliquer mon projet, insister sur sa valeur scientifique et sur les bienfaits que sa réalisation ne manquerait pas d’apporter, en ces temps de licence et de débauche où nous vivons, à tant d’enfantines et innocentes victimes de la dépravation masculine. Il a fini par se laisser convaincre. Lire la suite


Les fenêtres sont restées ouvertes. Seuls de légers voilages protègent la chambre de la relative fraîcheur de la nuit autant que des lueurs de l’aube naissante et, bientôt, de la lourde chaleur du jour.

La jeune fille, presque une enfant encore, dort profondément. Elle est brune comme les filles de là-bas, et ses longs cheveux brillent dans la pénombre, cuivre et acajou mêlés, avec des mèches d’ébène par endroits. Lire la suite