1. Je retrouve dans mon agenda de 2003, à la date du 8 septembre, l’indication suivante : 15b. Sophiënstrasse, 34. Muscat. Ces quatre mots me replongent dans la saison des rois Lear.
2. Il y avait eu une grève des postes. La masse des lettres en souffrance est arrivée d’un seul coup. Les enveloppes de tous formats gisaient sur le parquet. On s’est assis pour les trier, ma femme et moi ; elle avec un certain effort. Elle a repéré tout de suite une lettre au timbre exotique. Elle l’a posée sur son ventre. Elle a enfoncé sous le rabat la pointe bleue du coupe-papier.
3. À 80 ans, qui était pour elle la force de l’âge, Tante Lisa, la dernière sœur encore en vie de mon père, convoquait ses neveux et petits-neveux à Aachen, capitale de son empire des nuages. Elle avait une communication à leur faire. Le rendez-vous était fixé au lendemain.
Tante Lisa n’était pour moi qu’un nom. Je ne l’avais plus vue depuis ma communion solennelle. Le seul mot qui faisait déclic dans mon esprit était celui d’Aachen, au dos de la lettre tombée des nues. Ce nom, je le reconnaissais, sous son filtre germanique. Aix-la-Chapelle. J’y avais été en 1982 ou 83, visiter le tombeau millénaire de l’Empereur. Lire la suite
