Jeudi 1er décembre – François Hollande renonce. À l’ouverture des journaux télévisés de 20 heures, alors que l’on s’attendait à ce qu’il annonce sa candidature, en une voix blanche et quelque peu hésitante, il déclare qu’il ne concourra pas à la prochaine élection présidentielle. Ce soir, et surtout demain matin, toutes les réactions, de quelque côté qu’elles viennent, contiendront des mots comme élégance, lucidité, courage… Dans quelques mois, les gens de gauche commenceront à dire timidement qu’ils regrettent François ; et un peu après, des livres paraîtront, des émissions naîtront dans le paysage audiovisuel pour démontrer que ce quinquennat n’était pas si mauvais. Entre-temps, le peuple de France aura choisi le successeur ; et il est fort peu probable que Manuel Valls, malgré son dynamisme, sa volonté, sa force de conviction, parvienne à l’emporter. Comme en 2002, il est même possible que la gauche doive choisir entre la droite dure (Fillon) et la droite encore plus dure (Le Pen). Mais on peut toujours rêver. L’époque semble figée tandis que l’actualité ne cesse de transformer les incertitudes en surprises. Lire la suite


Ubu roi est une pièce de théâtre d’Alfred Jarry (1873-1907) publiée en 1896 dans la revue Le Livre d’art puis dans un volume édité au Mercure de France. Ce « drame en cinq actes en prose, restitué en son intégrité tel qu’il a été représenté par les marionnettes du Théâtre des Phynances en 1888 » (c’est le sous-titre exact de l’édition originale) est créé en décembre 1896, à Paris, par la troupe du théâtre de l’Œuvre, dirigée par le comédien Lugné-Poë. Lire la suite


Le cahier

Parce qu’elle avait les joues creuses, parce qu’elle était pleine de silences et d’arrière-pensées, elle ranimait ma curiosité romanesque toujours à l’affût, et je multipliais les ruses pour rester un moment seul chez elle, tandis qu’elle vaquait dans son cabinet d’aide sociale. Ainsi j’allais d’une pièce à l’autre sur la pointe des pieds, au passage frôlant des tiroirs enfoncés à bloc. Lire la suite


Il est là, au pied de l’escalier, dans un rai de lumière. Statique, engoncé dans son vieux costume gris mal coupé – pantalon flottant et désinvolte, veste trop large pour ses épaules tombantes, chemise blanche fermée jusqu’au dernier bouton. Seul son ventre est encore rond, réminiscence des années fastes. Il finit toujours par apparaître dans la salle. Quand on ne l’attend plus, quand les discussions ont glissé vers tout autre chose. Il est encore là. Qui aurait pu prédire dire ça ? Pas ces stupides instituts de sondages. À la limite, les gens du quartier, les fidèles, ceux de toujours. Lire la suite


Parfois, mes pas m’entraînent vers le site de l’ancienne gare. Il n’en reste qu’une façade. La gare elle-même, les rails, les libres terres attenantes et la vieille brasserie ne demeurent dans ma mémoire que par bribes éparses. Je vivais là, juste avant que tout disparaisse et soit remplacé par une cathédrale de marbre, de verre et de béton bâtie pour consacrer l’union des peuples. Lire la suite


« Vous devez apprendre le peuple, mon jeune ami ! Savoir percevoir ses attentes, ses émotions, pouvoir lui parler, le toucher, l’emporter jusqu’au fond de votre poche ! »

Les mots de Louis-Ferdinand Sauveur carillonnent dans mon crâne à m’en éclater les tympans au moment où la foule me comprime, où je glisse sur le sol au milieu des youyous, encaisse un coup de coude en pleine mâchoire, me relève, me heurte à un buste qui passe et m’expulse. Lire la suite


À un moment, il fallait bien que cela se termine…

Tout était apparemment à refaire. Toutes ces doses de bonne et pure (manière de parler) démagogie, toutes ces livraisons de mensonges et d’inventions sans frein, injectées depuis tant d’années pour brouiller les valeurs et porter au pouvoir des personnages incongrus, sans passé politique et aux manières transgressives affichées, n’ayant jamais eu de mandat électif mais se faisant fort de diriger un pays selon les méthodes qui leur avaient réussi dans le business ou le spectacle, voulant en finir avec le politiquement correct et ses normes castratrices ; tous ces efforts pour imposer la « post-vérité » ou l’« ère post-factuelle », dans laquelle les convictions l’emportent sur les faits et où la vérité n’est tout au plus qu’une hypothèse parmi d’autres – et plutôt moins attrayante et plus rébarbative qu’une autre puisqu’elle nécessite un raisonnement long et complexe - ; tout cela était battu en brèche par une tendance récente, un retour au sérieux que personne n’avait vu venir. Lire la suite