Pourrait-on sortir de chez soi pour aller explorer des mœurs autres que celles de la civilisation bancaire ? Mais pour en rencontrer, faudrait-il aller jusque sur Mars ? Peut-être que non. Il pourrait être encore possible d’aller se dépayser quelque part sur notre planète. Par exemple, là où les banques visent, certes, de nouvelles proies — mais ne les ont pas encore digérées. Des pays où les soucis ne portent pas le nom de dettes non remboursables, ou factures impayées. Lire la suite


Je sais que je n’ai pas le droit. Maman me l’a interdit. Mais ce n’est pas l’avis de grand-mère. Gâteuse, qu’elle dit maman : une vieille diva qui ne sait pas ce qu’elle fait. De toute façon, je ne peux m’en empêcher, tout simplement. Alors, j’ai déposé mes coquillages sur la table, au centre, bien étalés, pour pouvoir les admirer, chacun. Comme ils brillent ! J’ai caressé mon plus joli couteau : il a l’élégance des ongles de maman, lorsqu’elle les a manucurés. Il scintille, littéralement. J’ai glissé l’annuaire sur sa tranche légèrement aiguisée. Bien sûr, si on appuie trop, ça fait un peu mal, mais, par cette chaleur, la fraîcheur qu’il dégage tient du miracle. J’ai ensuite porté le trésor nacré à ma joue, tout lisse, tout doux. Et j’ai fermé les yeux. Comme devant Moïse, l’océan s’est ouvert pour moi. J’allais atteindre ma terre promise, les narines gorgées des parfums d’embruns. Des pas ont retenti dans l’escalier. Pour aujourd’hui, c’était fini. Vivement mercredi ! Lire la suite


— Long au moins jusque-là, imaginait Samantha en désignant ingénument à son amie Gina le dessous de son nombril qui, bien que serti d’un adorable petit brillant, apparaissait très dénudé sous le minuscule top moulant.

Puis, se tournant vers moi, dans un sourire ravi :

— Ça m’irait bien, vous ne trouvez pas, Monsieur Vandersteen ?

Et ses yeux mi-clos, ses lèvres entrouvertes faisaient que ce sourire semblait être un baiser.

* Lire la suite


Les nouvelles tournent en rond ou c’est moi, qui ne comprends plus. Ça visse et ça dévisse tous les jours et des jeunes ont encore incendié Rome, Athènes et Londres hier. Je ne parle pas des villes de province. Ça brûle, ça casse, ça avance, ça recule, ça cogne dur, la farce est terminée, on va bientôt tirer dans le tas. J’ai quitté l’école en juin et me revoilà à pied d’œuvre. Trois collègues manquent à l’appel, ils ont abandonné, terminus, ils rendent leur tablier aux fous qui voudront encore marmonner dans des salles de sauvages égoïstes et peureux. Ils fichent le camp. Ils nous avaient prévenus à la dernière délibération de fin d’année, ça changeait ou ils partaient. Sont partis. Pouvaient plus voir les tas de fatigue de quinze ans attendant la fin du cours en craignant le suivant. Pouvaient plus. Lire la suite


De deux choses l’une (et beaucoup d’autres entre les deux) : ou le glas est en train d’être sonné de l’Ancien Monde – États-Unis compris, qui ont réussi à vieillir prématurément –, ou l’on est simplement dans un virage particulièrement dangereux, qu’il est nécessaire de négocier pour éviter le désastre.

Dans un cas, il vaut mieux se sauver au plus vite, et chercher des cieux plus cléments ; c’est d’ailleurs ce que beaucoup de jeunes s’empressent de faire, qui apprennent le chinois ou le japonais à marche forcée. Dans l’autre, il faut procéder à la révision critique et sévère de ce qui nous a menés où nous sommes, c’est-à-dire dans ce qui ne pourrait être qu’une crise. Lire la suite


Le nez de Cléopâtre, s’il eut été plus court,

toute la face de la terre aurait changé.

Blaise Pascal

Pendant la minorité de Louis XV (1715-1723), sous la régence de Philippe d’Orléans, frère de Louis XIV, la situation du royaume de France était désastreuse. Pourtant, des Cassandre avaient osé stigmatiser le pouvoir absolu et suggérer des réformes, mais, comme la princesse troyenne, ils ne furent pas entendus.

En 1645, Mazarin, sous la régence de la reine Anne, avait fait voter une nouvelle constitution de tendance démocratique : liberté des personnes et des biens, interdiction de détenir un prisonnier plus de vingt-quatre heures sans l’interroger, interdiction de créer un impôt ou un office nouveau sans vote du parlement, abolition d’un quart des impôts.

René Descartes (1596-1650) avait pour principe de maîtriser ses passions et de n’admettre que la raison dans les matières scientifiques. Lire la suite


Ça y est, c’est fait : l’écran de télévision est aujourd’hui détrôné par ceux des smartphones, des PC fixes et portables, des baladeurs multimédias et autres tablettes. Finis donc les séries débilitantes, les talk-shows interminables, les spots de pub, les docus chiants. Oufti ! Mais, depuis un mois, les petits écrans individuels se sont mis à bombarder la population d’une kyrielle de chiffres en milliards d’euros, de dollars, de roubles, de yens, vantant une croissance qui frise le choquant, tout en évitant soigneusement — c’est l’été, les vacances — les nouvelles déprimantes comme l’annonce de faillites en cascade, la détresse profonde de millions de chômeurs et autres réelles tragédies sociales :

« 90 milliards pour mettre en place des mécanismes de couverture du risque de taux en baisse. » Lire la suite