Tout vacille sur ses bases qui sont, comme on est mal payé pour le savoir, économiques. Le tsunami financier submerge la planète entière, mais l’Occident surtout, forçant seulement les pays émergents à renoncer à leur croissance à deux chiffres. Ne nous attendons pas aux conséquences de ce chambardement pour la Belgique, qui semble n’échapper à l’effacement de la carte que parce qu’elle a une raison d’être européenne qui la force à surnager. Nous avions, souvenons-nous, envisagé qu’elle trouve en son Premier ministre à la fois l’exécuteur et la désignation de son terme. L’intéressé a, après une embellie due à sa familiarité avec les chiffres qui fit un temps illusion, définitivement compris qu’il avait pulvérisé son niveau d’incompétence. Y a-t-il encore des pilotes susceptibles de guider le rafiot Belgique ? D’aucuns prétendent que le moule est cassé, et ceux qui aimeraient leur riposter manquent, il faut bien l’avouer, tragiquement d’arguments.

Pendant des mois, sous toutes les latitudes, les nations furent distraites de leur sort, même des plus préoccupants, par le destin politique de celle qui passait encore pour la plus puissante d’entre elles. Les Étatsuniens ne furent pas les seuls à se demander à qui ils confieraient leur sort. Ébranlés par les deux mandats du lamentable Bush junior, qui restera dans l’Histoire pour avoir été le démolisseur de son pays sur tous les plans, ils sentaient que cette fois ils jouaient à quitte ou double. Cette conscience, ils l’ont, au fil de la campagne partagée avec d’innombrables citoyens du reste du monde. Jamais on ne vit tant d’opinions publiques se mobiliser pour une cause qui ne les regardait en principe pas. C’est qu’il se jouait entre Atlantique et Pacifique une grande bascule qui dépassait la politique, qui relevait de l’anthropologie. Lire la suite



Bien sûr, il ne s’appelait pas comme ça. C’est moi qui avais imaginé cette transposition. Il était améri-cain, notre premier contact avait été facile. Il avait la fierté naïve de son pays gigantesque, je souriais moi-même de l’amoureuse exiguïté du mien. D’où tu viens ? Oh ! Cool. Fascinating. Il était pianiste. J’étais informaticienne. Il rêvait de composer sur ordinateur, je rêvais de ne pas avoir abandonné le piano à dix-huit ans. En général, on situe une rencontre en écrivant : quand je l’ai vu pour la première fois. Moi, je l’ai entendu. Il jouait je ne sais quel morceau de Toots Thielemans, en faisant traîner le piano comme un harmonica. La fibre nationale a dû jouer. Il avait l’air disponible, éveillé, pas stone : plutôt sable et eau. Lire la suite



Là-bas, loin au-dessus, le ciel de juillet entasse des collines aléatoires que le vent déforme et disperse en direction du sud-est. En bas, cloué au sol, Lunus fume une cigarette allongé sur le plancher de la cour. La fumée monte après quelques hésitations, aspirée par le vent, le ciel, les collines mobiles.

La mort rôde depuis sept mois. Pas seulement ici, dans cette cour. Elle traîne autour de Lunus. Sans relâche. Où qu’il se déplace, elle l’accompagne. En tous lieux. En dehors de la chair. En suspens de la chair. Quelquefois, elle se matérialise au creux de son ventre. A l’improviste. Sans qu’il puisse en comprendre les causes. Lire la suite


« J’ai fait un rêve », affirmait

Le Pasteur Martin Luther King.

« Faisons un rêve!», proclame

Cet homme neuf

En nous ouvrant les portes

D’un nouveau monde enchanteur»

Chanson électorale,

 octobre 2008

Une biographie, ça s’invente

Louis-Ferdinand Céline

 

Barock Ousmane Obamo II est le premier saint politique de l’histoire de l’humanité. Fait remarquable à son époque pour une personne de couleur, il s’est imposé comme celui que chacun, brusquement dépourvu de repères éthiques et économiques, attendait désespérément. Surgissant au plus fort d’une tourmente financière d’envergure planétaire, alors même que les nations basculaient dans l’angoisse d’une récession traînant après elle les spectres de la guerre et de la misère, il a su incarner le désir d’un changement généralisé. Lire la suite


La scène est à la Maison Blanche.

— Mister President… (grand sourire contraint) George… Double you…

Ya… (il claque sa main dans le dos de son hôte qui, lui, reste la main tendue dans le vide.)

— Ya ? Que… ? Ah oui ! Double ya… À la texane. (En sourdine) Que me vaut l’honneur de rencontrer mon prédécesseur ? Lire la suite


Des briques en papier journal compressé, des débris de toutes sortes, des déchets glanés au fil des promenades, des saletés sans pareil reconverties en combustibles, c’était ça sa vie. Tenir avec la merde des autres, la façonner pour l’enfourner ensuite dans la gueule de son brûle-tout, tout au fond de la cuisine.

Il a tout brûlé jusqu’à ce que la cheminée s’encrasse et que ce soit la maison qui prenne feu, un soir de dimanche, quand tout le monde cuvait les malheurs du jour et se préparait à la fatigue de la reprise. Ça avait flambé si vite que sa femme partie faire quelques courses découvrit un tas de brandons presque éteints à son retour. Lire la suite


Il ne se passe pas de jours que nous menions à l’abattoir les plus purs de nos élans.
Henry Miller

Henry Miller demeure un des écrivains sur lesquels on se méprend le plus. Miller n’était pas qu’une fashion tendance, un effet de mode, c’était de l’action pure.

Tantôt rabelaisien, tantôt gourou pornographe, esclavagiste du sexe, peintre obnubilé par l’épure de la calligraphie chinoise, ou papillon de nuit par la pensée bouddhiste. Tantôt prophète visionnaire du « dérapage américain ». Longtemps après sa mort, les craintes de Miller envers son pays tombent pile. Les Américains, et leur puritanisme hypocrite. Les grands justiciers de la planète, les donneurs de leçon. Les plus grands pollueurs du monde, les pionniers des OGM. L’empire du fric à jolie façade. Le signe de croix d’un George W. Bush… Lire la suite