Description
Chaque jour qui passe exclut une espèce animale du menu des humains. Comme si un cycle s’interrompait, qu’il était dit que désormais le vivant ne nourrirait plus le vivant, le vif ne saisirait plus le vif. Une grand-peur gagne les esprits, d’autant plus prégnante qu’elle passe par les corps, et par le mystère de leur fonctionnement interne. Mystère largement éclairci par le savoir, mais la divulgation, toujours incomplète, ne donne que davantage le vertige. La connaissance chèrement acquise révèle qu’au-delà de ce qui est su se cache ce qui reste indéfiniment à découvrir. Et c’est ainsi que le sol semble se dérober sous les pas. Comment se fier au plancher des vaches, si les vaches elles-mêmes ne sont plus fiables ?
D’autant qu’elles n’en peuvent mais, ces pauvres ruminantes. On leur a donné à mâcher ce dont elles n’ont jamais eu le goût, ce qu’elles se seraient bien gardées de happer elles-mêmes. Ah, si le vœu des fabulistes s’était réalisé, si elles avaient été douées de la parole ! À quels réquisitoires aurions-nous eu droit ! À quand un nouveau roman de renard, où se ferait le procès, avec éloquentes bêtes à la barre, de la folie et de l’hypocrisie humaines ?